A. Duclona J.B. Aristide J.P. Lauture A. Nazaire
Il y a dix ans, un homme d'affaires haïtien
nommé Claude Bernard Lauture, âgé de 51 ans, et connu comme "Billy"
a été enlevé et assassiné. Cette semaine, la Cour d'Assise de Paris a condamné à
25 ans de prison Amaral Duclona, un ressortissant haïtien, comme responsable du
meurtre. Si ce n'était pas pour une interview
sur radio Vision 2000 Radio avec sa veuve, Marie-Louise Michèle Lauture, cette
conviction serait passée inaperçu. Le 26 Mai, Marie-Louise Michèle a partagé
avec le public haïtien sa souffrance et le calvaire qu’elle a vécu au cours des
dix dernières années. Ce fut l'un des entretiens les plus émouvants que j'ai
entendu et ca a été choquant pour tous les auditeurs ce jour-là. Au cours de
l’interview, elle a présente le contexte politique de l’époque, l’environnement
autour de l’assassinat de son mari, la psychologie
criminelle de l'ancien président Jean Bertrand Aristide auteur intellectuel
du crime et les faiblesses de système judiciaire en Haïti .
Bernard et Marie-Louise Michèle Lauture ont eu
cinq enfants au cours d'un mariage heureux. Il était un homme d'affaires
haïtien intègre, crédible et respecté dans le domaine de l'ingénierie électrique.
En 2003-04, ce couple qui normalement est très réservé est descendu dans les
rues de Port-au-Prince pour protester pacifiquement contre la répression
croissante et la corruption du gouvernement Lavalas dirigé par Jean Bertrand Aristide.
À titre d’information, le 26 Novembre, 2000
Aristide a mis en place un conseil électoral forme de marionnettes pour
réaliser un coup d’état électoral et voler la présidence. Des rapports de
presse et des partisans d'Aristide annonçaient qu'il a remporté ces élections
avec 83 % des voix exprimes, mais ont
néglige de mentionner que le taux de participation était d'environ 1 % et les
urnes ont été bourrées pour obtenir ce taux. Pour garder la stabilité le
Conseiller à la Sécurité Nationale du président Bill Clinton, AnthonyLake et Jean Bertrand Aristide signaient un accord en huit points qui
prévoyait un ensemble de mesures démocratique et la primauté du droit pour
retourner Haïti a l’ordre constitutionnel. Cet accord sans le vouloir donnait une légitimité au coup
d’état électoral. A cette époque, le président Clinton avait tellement investi de
son prestige dans sa politique étrangère en Haïti compte tenu de l’intervention
militaire de 1994 qu’il avait très peu d'options pour faire face au coup d'état
électoral Aristide . Aristide savait et a tenté de faire chanter
le président des Etats Unis a travers des menaces que nous connaissons
tous : « Pour que les choses se
passent bien aux Etats les choses devraient bien se passer en Haïti »
Lorsque Aristide est rentre au Palais sous la
contestation le 7 Février 2001, au lieu de mettre en œuvre de l'accord qui
faciliterait le retour à l'ordre constitutionnel en Haïti, il se tourna vers
ses tactiques politiques violentes en ignorant les offres de dialogue et de
compromis politiques faite par l'opposition démocratique qui le pressait sur
l’application des huit points. Au lieu de dialoguer, il a préféré faire brûler
le siège de plusieurs partis
politiques de l'opposition et les résidences privées de dirigeants de
l'opposition ; a attaqué violemment les organisations de femmes
et de jeunes
pression qui se battaient pacifiquement pour le changement ; terrorisé la
presse et les militants des droits
de l'homme. Beaucoup de gens sont morts comme conséquence de cette violence
Lavalassienne.
Quand il était clair que Aristide ne voulait
pas compromis, les citoyens
haïtiens, avec cette fière tradition de responsabiliser leurs dirigeants et
défendre la démocratie, se sont rassemblés pour exiger la démission d'Aristide,
y compris des membres de sa propre coalition. Encore
une fois, Aristide a décidé que la répression, les enlèvements et les meurtres
étaient le meilleur moyen de lutter contre ces manifestations pacifiques. Il a organisé
des gangs et distribué des armes aux chimères. Ces membres de gangs, les chimères,
étaient protégés par une
force de police hautement politisée qui servait les objectifs politiques du
mouvement Lavalas. Moise Jean Charles, un membre de la coalition Lavalas,
actuellement sénateur, avait décidé de lutter contre la violence d'Aristide en demandant
de l'aide a Guy Philippe selon une interview
réalisée récemment.
C'est dans ce contexte que l'enlèvement de
Bernard a été organisé et réalisée. Au cours de l'entrevue
avec Marie-Louise Michèle, elle a donné un compte rendu détaillé sur la façon
dont Amaral Duclona - sous la direction d'Aristide – a kidnappé et tué son mari
. Elle a également partagé des détails sur la façon dont l'enquête de la police
et le système judiciaire a été a la recherche des faits et preuves. Selon
l'interview et divers documents de la procédure de police et de justice, un
membre de la famille de Bernard, Madame Gladys Lauture, qui était un proche
collaborateur d'Aristide, a approché Bernard. Compte tenu de sa position respectée
dans la communauté et la position générale négative montante contre Aristide,
il lui a proposé divers postes ministérielles dans le gouvernement Lavalas,
dont le ministre des Travaux publics, en échange de son soutien. Il a refusé.
Paraphrasant Le Parrain, Gladys a informé que ce n'était pas une offre qu’il
pouvait refuser. Le fils de Gladys, Jean Paul Lauture, un étudiant de l’université
MIT, un associé politique d'Aristide a averti Bernard qu’en prenant la décision
de protester contre le président n’aboutirait pas a quelque chose de bon pour
lui. Bernard resta ferme dans ses convictions qu’il ne pouvait pas collaborer
avec un gouvernement qui violait les principes de la démocratie et les droits
de la personne. Gladys de son cote changea de tactique. Elle se présenta un
jour à la résidence de Bernard avec une lettre signée par le président le
nommant en tant que membre du conseil de la compagnie d'électricité appartenant
à l’État. Bernard a été révolté par cette action et a dit qu'il n'était pas à vendre.
Il a de nouveau rejeté l’offre. Sa femme comprit que rejeter l’offre comportait
des risques, elle lui conseilla d’accepter le poste afin de ne pas gêner le
président Aristide. Elle a suggéré qu'il pourrait démissionner après deux
réunions en faisant valoir que la position interférait avec sa capacité de
gérer son entreprise et participer à des priorités de la famille. Il suivit les
conseils de sa femme.
Le 6 Janvier 2004, Amaral Duclona, le chef
d'un des gangs d’Aristide, enleva Bernard alors qu'il était en route pour aller
chercher ses enfants à l'école. Juste avant l’enlèvement, Bernard était au
téléphone avec sa femme. Comme d’habitude a la fin de la conversation ils se
sont dit: «Je t'aime». Ils ne savaient pas que ce serait leur dernier mot ou la
dernière déclaration d'amour. Peu de temps après, les ravisseurs ont appelé la
famille et mis Bernard au téléphone avec des instructions sur ce qu'il faut
dire. La famille pouvait entendre une voix dans le fond qui lui dictait de
demander 100.000 dollars de rançon. Au cours de cet appel téléphonique, Bernard
donna à la famille une indication qui laissait croire qu'il était dans le
Commissariat de Police du Canapé Vert. La famille a contacté Gladys et lui a
demandé d'intervenir en raison de sa relation avec Aristide. Pendant ce temps,
Marie-Louise Michèle toute seule sollicita l’aide de l'ambassadeur français à
Haïti étant donné que Bernard
avait la double nationalité.
Pendant le procès, il s'est avéré qu’il y
avait un autre enlèvement et que la victime était dans la même cellule avec
Bernard. L’autre victime avait réussi à obtenir sa libération. Selon le
témoignage de cette victime, les kidnappeurs Amaral Duclona et Junior Charles,
alias Yoyo Piman, un lieutenant de Amaral, giflaient Bernard avec des photos
d'Aristide.
Jacques Anthony Nazaire assurait la
coordination entre Aristide et les chefs de gangs Amaral Duclona et Yoyo Piman
était. Officiellement Nazaire était chargé du garage et de la voiture de la
flotte des véhicules d’Aristide, mais il est plus connu comme celui qui gérait
les gangs pour lui.
Gladys Lauture répondît à Marie Louise Michèle
qu'elle verrait Aristide pour son mari. Gladys contacta Aristide le même jour
et quand elle est revenue elle fit savoir a Marie Louise Michelle qu'elle
quittait le pays pour une visite médicale prévue il ya des mois. Elle disparut.
La famille n'avait pas d'autre choix que
d'attendre un autre appel des kidnappeurs avec des instructions sur où ils
doivent déposer l'argent. Cet appel n'est jamais venu. Au lieu de cela, un groupe
de chimères lourdement armé est allé à la morgue nationale pour déposer le
cadavre de Bernard Lauture avec des instructions spécifiques au gardien de
morgue sur où le placer tout en le malmenant le corps. Ce jour-là, des membres
des gangs, ou chimères d'Aristide, avaient le contrôle des rues de Port-au-Prince.
Ils ont détruit plusieurs entreprises. La violence des chimères était aveugle
et brutale pour les citoyens et particulièrement pour ceux opposes à eux.
Le 8 Janvier, la veuve, Marie-Louise Michèle,
est allée à la morgue aidée par un ami d'enfance. Quand elle est arrivée à la
morgue, le responsable en larmes lui a demandé pardon et lui a dit qu'il ne savait
pas que c'était son mari. Il a dit qu'ils lui ont donne des instructions
spécifiques pour mal gérer le cadavre et le placer la ou il était. Elle fit
chercher le cadavre de Bernard pour l’identifier. Elle a vu au moins 10 trous
de balles dans son corps sans vie. Elle a été interdite de prendre possession
du corps de son mari parce que, selon la loi haïtienne un médecin légiste doit
procéder à une autopsie avant de délivrer le corps. Etrangement, elle ne
pouvait pas trouver le médecin légiste.
Quand Marie-Louise Michèle quittait la morgue,
Jean Paul Lauture, au nom de Jean-Bertrand Aristide, l'a menacée. Il lui a dit
que le jeu qu'elle jouait avec l'ambassade française ne va pas être bon pour
elle. Pourtant Marie-Louise Michèle n'a pas parlé à personne de ses discussions
et démarches auprès de l’ambassade de France en Haïti. Elle répondit a Jean
Paul Lauture: « Je ne comprends pas ce
que vous me dites. Mon mari Billy est mort. Je n'ai même pas pleuré. Quand je
l'ai vu, je me suis mise à genoux et j'ai prié Dieu. J'ai dit à Dieu que vous
lui avez donné à moi et maintenant vous l'avez reprit. C'est votre volonté,
Dieu." Pendant qu’elle disait ces mots, elle entendit Jean Paul
parlant avec quelqu’un sur son téléphone cellulaire dire:« Oui, Excellence !" Il se tourna ensuite vers Marie Louise
Michèle et dit: «Vous ne savez pas avec qui
je parle? Je parle avec le président Jean-Bertrand Aristide".
Jean Paul dit a Marie Louise Michèle que le président m'a demandé de vous
transmettre un message: "Chen ki gen
kel anba pa twavese dife ». Ce qui constituait une menace directe qui
pratiquement voulait dire, tu ferais mieux de te calmer sinon ce seront tes
enfants la prochaine fois. Cette remarque trahit le fait qu’Aristide avait été
mis au courant et s’inquiétait de l'enquête de l'ambassade de France.
Face à ces menaces directes d’Aristide sur ses
cinq enfants, Marie Louise Michèle et sa famille ont fui Haïti et s’en alla en exil
à Madrid. Avant son départ, aidé par une organisation haïtienne des droits
humains, le Centre œcuménique des Droits Humains (CEDH), elle a déposa au
Bureau du Commissaire du Gouvernement une plainte contre X pour retrouver le
assassins de son mari. Aristide fit casser ce bureau et fit disparaître le
dossier de la plainte déposée par Marie Louise Michèle.
Alors que la procédure judiciaire entamée par
Marie Louise Michèle en Haïti était enterrée, le système judiciaire français continuait
son enquête sur l’assassinat de Bernard Lauture. Des juges et enquêteurs
français travaillaient en étroite collaboration avec la police nationale et le
système judiciaire Haïtien malgré les tentatives de blocages. Au cours de la
procédure judiciaire en France, Jean Paul Lauture a été convoqué par le
tribunal pour témoigner. Il a refusé en disant que cela perturberait ses études
a l’université MIT aux Etats Unis. Gladys et Jean Paul n’ont pas pu répondre
aux questions en dépit du fait qu’ils avaient beaucoup d’informations sur le rôle
d'Aristide dans ce kidnapping mais surtout leur rôle en tant qu'intermédiaires
dans les menaces spécifiques contre Marie Louise Michèle et ses enfants.
Marie-Louise Michèle croit que Gladys et Jean
Paul Lauture étaient simplement des messagers d’Aristide et qu’ils n’ont rien à
avoir avec le kidnapping et l’assassinat. Malgré la conviction de Duclona, elle
croit fermement que l'ancien président Aristide est le principal responsable du
kidnapping et de l’assassinat de son mari. Ses conclusions sont basées sur les
preuves présentées lors du procès, y compris des enregistrements téléphoniques
et des témoignages. Les procédures judiciaires ont établi que Amaral Duclona
était responsable de l'assassinat de Bernard Lauture , mais Marie-Louise Michèle
estime que Jacques Anthony Nazaire et Aristide devraient aussi faire face à un
jury aussi, mais sait que c’est presque impossible. Elle déplore que le système
judiciaire haïtien soit faible et les témoins en Haïti ont encore peur des
bourreaux qui sont toujours puissants.
Aristide et Jean Dominique
Fort malheureusement, Marie Louise Michèle
Lauture a un argument valable. Elle n'est pas la seule famille à faire face à
cette tragédie. Les procédures
judiciaires sur l'assassinat du journaliste Jean Dominique sont en cours
depuis Avril 2000. Au cours des 14 dernières années, Aristide a fait tuer des
témoins et utilisé son pouvoir politique pour entraver la justice. Il ya quatre
mois, le juge d’instruction Yvickel Dabrezil conformément a la loi rendit public
ses conclusions sur le meurtre du journaliste. Il a identifié les neuf personnes
responsables de la mise à mort de Jean Dominique. Tous des hommes de main de
l'ancien président Aristide. Ils avaient prétendument tué Dominique parce qu’il
représentait une menace pour le retour de Jean Bertrand Aristide au pouvoir.
Venel Joseph
Il
en est de même pour l'enquête sur l'assassinat de Venel Joseph, un ancien
gouverneur de la Banque centrale d'Haïti, confronté à une pression politique.
Venel allait se rendre à Miami pour témoigner devant un tribunal des États-Unis
au sujet d'un scandale
de corruption de télécommunications. Son fils, Patrick Joseph, était déjà en
détention judiciaire à Miami et avait déjà fourni des détails sur la corruption
d'Aristide dans le domaine des télécommunications en Haïti. Deux jours avant le
voyage de Venel, un article paru dans le Miami Herald révéla ce qu'il allait
faire, et Aristide le fit exécuter avant son départ.
Pour moi, et j'imagine pour les auditeurs, c’était
déchirant d’écouter cette femme et le calvaire qu’elle a traversée avec ses
enfants en Haïti, la terreur dont ils ont fait face, et les luttes qui
s'ensuivent pour s'adapter à la vie dans un pays étranger. Lorsqu'on lui a
demandé comment elle a survécu tout ca, elle répondît que c’est sa foi en Dieu.
Elle n’a aucune rancune et ne hait personne. Elle va continuer à vivre avec ses
enfants. C’est ce que voudrait Bernard dit-elle.
En plus de raconter les faits, elle a parlé
ouvertement de l'impact émotionnel profond que l’assassinat de son mari et les
persécutions politiques qui ont suivi ont eu sur ses enfants. Les enfants
confrontés à la moquerie de leurs camarades sur la base de rumeurs entourant l'assassinat.
Elle a dit que ses enfants baissaient la tète à chaque fois avec une certaine
honte. Avec cette décision de justice, ses enfants peuvent relever la tête dans
l'orgueil d'un père qui était un héros de la démocratie; un homme qui n'a
jamais reculé face aux menaces et intimidations. Il se tient en compagnie de grands
haïtiens comme Sylvio Claude et Jacques Roche qui se sont battus pour leur
peuple et n'ont jamais reculé. Bernard était un homme de principe. Comme
Winston Churchill l'a dit - " si vous avez des ennemis, cela signifie que
vous vous battez pour quelque chose dans votre vie ". Bernard l’a fait. Malheureusement,
ses ennemis l'ont fait payer le prix ultime.
En fin de compte, c'est une victoire limitée.
Malgré la condamnation de Duclona, Marie Louise Michèle et ses enfants ne
pourront jamais rentrer chez eux en Haïti tant qu’Aristide et ses bourreaux
feront peur à la justice haïtienne et aux victimes.
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