Voilà une question qui attend encore une réponse. Une autre affaire non élucidée. Cela fait déjà quatre ans. Les promesses du ministre de la Justice d’alors, Jean Joseph Exumé, n’ont pas été tenues. Et aujourd’hui, on en parle plus. Les affaires de drogue ne se résolvent pas facilement, s’il faut croire les propos de M. Exumé, qui n’est plus ministre. Ce dossier, comme beaucoup d’autres en Haïti sont classés sans suite et pourrissant dans les tiroirs, cache bien des vérités qu’on aimerait bien connaître.
Beaucoup d’interrogations sont soulevées sur cette affaire. D’aucuns se demandent pourquoi seuls des employés mineurs ont pâti de l’histoire et pourquoi après quatre ans ce dossier piétine encore. La question est complexe ! Trop d’hommes sont souillés dans l’affaire ! Trop d’hommes ont eu leur part des narcodollars d’Alain Désir !
Un agent de l’Udmo, investigateur présent lors de l’opération chez Marc Fréderic, toujours en « cavale » (s’il faut parler de « cavale », puisqu’il fonctionne dans la ville), confie que ce dossier n’aura pas de fin. Selon lui, l’argent et les objets de valeur qui ont été découverts au cours de cette perquisition ne pouvaient pas être comptés en un jour. Il explique qu’en sa présence le compte a été fait dans une petite maison située non loin du parquet. La somme, selon lui, était importante que le commissaire d’alors, Michenet Balthazar, aurait décidé que l’argent serait partagé avec les autorités de Port-au-Prince.
Vingt millions de dollars en liquide auraient été mis de côté par le commissaire Balthazar qui les aurait acheminés au ministère de la Justice. Selon cet agent investigateur de l’Unité départementale pour le maintien d’ordre(Udmo), l’ex-ministre Jean Joseph Exumé aurait reçu 10 millions et le reste aurait été partagé entre Moline Junior, alors directeur des affaires judiciaires du ministère, et Josué Pierre-Louis, directeur général, devenu par la suite, mais de facon très éphémère, ministre de la Justice de l’actuel gouvernement.
Combien d’argent avait Alain Désir dans sa cave ?
Le doyen de Port-de-Paix d’alors Ronel Gelin avait estimé à près 32 millions de dollars américains la somme trouvée chez Marc Fréderic, dont une partie dans une cave et une autre dans une mallette. Aujourd’hui, des acteurs impliqués de très près dans ce dossier de drogue et qui étaient sur place au cours de la perquisition ont évalué l’argent dérobé à plus de 50 millions de dollars. Entre-temps, le narcotrafiquant purge une peine de cent soixante-dix mois de détention dans le district Sud de la Floride depuis le 4 juin 2009. Tous ces biens ont été confisqués ou pillés. Il a été arrêté à Port-au-Prince 21 octobre 2008, puis extradé aux États-Unis d’Amérique où il est détenu pour trafic illicite de stupéfiants.
Cette affaire que M. Jean Joseph Exumé avait qualifiée de pseudo scandale n’est toujours pas résolue comme il l’avait promis. Et il faudrait aujourd’hui revoir les dossiers classés dans les tiroirs du parquet de Port-de-Paix pour comprendre les réticences dans la résolution de cette question de drogue. En fait, de ce pillage des fonds du narcotrafiquant, seulement 1 million 737 mille 190 dollars américains ont été officiellement déposé sur un compte au numéro 377-000 Ucref de la BRH, selon les données fournies par Yves Martial, commissaire du gouvernement à Port-de-Paix.
Une enquête sans issue !
La publication du rapport devant faire la lumière sur cette affaire devait avoir lieu le mardi 20 janvier 2009, selon ce qu’avait annoncé le député Arsène Dieujuste, président de la commission d'enquête parlementaire sur le scandale des narcodollars de Port-de-Paix. Selon le parlementaire, le traitement du dossier a été fait suivant une politique partisane. Il avait alors dénoncé les décisions discriminatoires prises par les autorités. Le député avait noté que seuls des greffiers et secrétaires du parquet de Port-de-Paix ont été mis sous les verrous. Par ailleurs, Me Yves Martial rappelle qu’au cours de ces dix dernières années, le parquet de Port-de-Paix a été un bastion de corrupteurs qui n’ont jamais su faire long feu dans le système. Il dit essayer, depuis seizemois, de redorer le blason de la justice à Port-de-Paix. Le commissaire est conscient que c’est un travail de titan que de résoudre les problèmes judiciaires. Toutefois, il se dit déterminé à mener à bien sa tâche de commissaire du gouvernement.
Mais qu’est-ce qui s’est vraiment passé ?
Le 12 novembre 2008 une perquisition a été menée chez Marc Fréderic, oncle d’Alain Désir, habitant la même zone que son neveu. Cette opération fut lancée sous la direction de Me René MOÏSE, substitut du commissaire du gouvernement près le tribunal de première instance de Port-de-Paix. Saint-Marc Bouquet, juge titulaire au tribunal de paix de Port-de- Paix, Jean Mathieu Dorvilus, suppléant juge de paix, Gaby Dorelien, greffier, Albert Loriston, greffier, Mangle Samson, représentant de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah), et un contingent de dix-huit policiers de l’Unité départementale pour le maintien de l’ordre (Udmo) avaient participé à l’opération.
Le commissaire du gouvernement, Michenet Balthazar, en voyage aux États-Unis d’Amérique, informé de l’opération et pour s’assurer de sa part du butin, aurait recommandé son chauffeur, Jean Simon Miclasse, au commissaire a. i. René MOÏSE, pour l’accompagner dans cette opération. La perquisition du 12 novembre 2008, selon un rapport du RNDDH, s’était transformée en une véritable opération de pillage où des objets de valeur ainsi qu’une forte somme d’argent dont le montant exact n’a pas pu être déterminé, ont été emportés par ceux qui ont pris part à cette opération. Les 12 et 14 novembre 2008, une distribution en règle aurait été réalisée au commissariat et au parquet de Port-de-Paix par les pilleurs du domicile de Marc Fréderic.
Maître René Moise, alors substitut du commissaire du gouvernement près le tribunal de première instance de Port-de-Paix , encore en cavale aujourd’hui, pour étouffer l’affaire aurait non seulement distribué des narcodollars au parquet, mais aussi aurait offert un peu plus de dix mille dollars au doyen Ronel Gelin, qui les aurait refusés pour éviter de se corrompre. Ronel Gelin, depuis, serait considéré comme une bête noire pour les corrompus de Port-de-Paix et de Port-au-Prince, selon ce qu’il nous a confié au cours de notre enquête sur ce dossier. On comprend donc pourquoi il a été démis de ces fonctions de doyen.
Des officiels américains à Lavaud, pourquoi ?
Le mardi 28 février dernier, une délégation a été à Port-de-Paix dans le cadre de cette affaire. Christ Anson, haut cadre de l’ambassade américaine en Haïti, les experts Joseph G. Tassy, senior police adviser international narcotic and low enforcement, et Chritian Remy, NAS cownpter narcotic – co adviser, accompagnés de plusieurs agents du BLTS, ont composé cette délégation. Sept voitures officielles se sont rendues à Lavaud. Des autorités locales, telles que le commissaire du gouvernement, Yves Martial, ont aussi été sur place. Il était question de visiter tous les immeubles confisqués dans le cadre du procès contre le narcotrafiquant Alain Désir.
Plusieurs décisions sont ont é arrêtées suite à cette visite de cette visite : construire une base sur une plage qui appartenait à Alain Désir pour lutter contre la corruption, implanter un commissariat dans l’immeuble qui servait de supermarché à Lavaud, pour recevoir et traiter les dossiers de stupéfiants, un laboratoire pour analyser les produits recueillis dans les saisies. Dans cet immeuble, il sera logé une unité spécialisée dans le narcotrafic avec son port d’embarquement lié directement au bureau du BLTS de Port-au-Prince.
Cependant, aucune mention n’a été faite de ce dossier qui est aujourd’hui devant la Cour d’appel. Les vrais coupables sont soit en cavale, soit tout simplement chez eux sans s’inquiéter. Jean Joseph Exumé avait promis l’aboutissement de l’enquête, mais il n’en est rien jusqu’à présent.
Jackson Joseph
jajph@yahoo.ca
Le Matin www.lematinhaiti.com
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