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Mwen se echantiyon yon ras kap boujonnen men ki poko donnen

Si vous voulez vous faire des ennemis essayer de changer les choses

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Thursday, May 17, 2012

Forum sur les défis de la reconstruction en Haïti: Deux ans après le séisme: Constats et analyses par Michèle D. Pierre-Louis


Je remercie l’AQOCI de m’avoir invitée à tenir les propos d’ouverture à ce Forum qui réunit une nouvelle fois des collègues haïtiens et québécois autour de la problématique de la reconstruction en Haïti, après les destructions massives causées par le séisme du 12 janvier 2010, et des pertes en vie humaine qui se chiffrent autour de 300 000 personnes. Nul doute qu’il s’agit là d’une catastrophe majeure et il est impératif effectivement, comme l’ont jugé les organisateurs du forum, deux ans après, de dresser des constats et de proposer des analyses qui, je l’espère ouvrirons des pistes de réflexion susceptibles de renouveler la pensée sur ce pays qui déroute autant qu’il fascine.

Je tiens à souligner l’engagement de l’AQOCI et de la Concertation pour Haïti auprès des organisations haïtiennes dans leurs luttes pour les droits, pour le changement social et la démocratie en Haïti.

Un des pays les plus expertisés se plait-on à dire, celui sur lequel on ne cesse de publier des rapports et des essais de toutes sortes, sur tous les sujets, allant de l’économie à la culture, de la sécurité à l’éducation, de l’environnement à la démographie, de la reconstruction à la refondation, de l’histoire à la pauvreté. La pauvreté oui. Parce qu’il faut surtout mettre en exergue le slogan qui ne manque jamais de nous qualifier et qui semble toujours vouloir nous réduire à cette essence là : « le pays le plus pauvre de l’hémisphère ».

Et pourtant, en dépit de tentatives d’analyses parfois savantes mais trop souvent aplaties sur de fausses certitudes, la complexité de la société haïtienne échappe encore à ceux qui par fascination, par compassion ou par opportunisme croient saisir les caractéristiques fondamentales d’un pays en pleine mutation.

Regarder ce pays de près, de très près exige une grande humilité. Celle qui commande le respect pour un peuple qui a fait la démonstration au monde entier qu’il était possible, au sortir d’un combat victorieux contre l’esclavage et contre les plus grandes puissances colonialistes de l’époque, de survivre pendant près de deux siècles, dans la précarité absolue en se forgeant un mode de vie, une vision du monde, de la maladie, de la mort, de la solidarité et de la dignité. Pendant longtemps seul, absolument seul. Conséquence de l’insolence.

Mais en même temps, cette exigence d’humilité s’accompagne nécessairement d’un regard sans complaisance sur les mécanismes internes autant qu’externes qui ont conduit à la dégradation actuelle, antérieure au séisme du 12 janvier, mais que celui-ci a mis à nu, révélant dans son imprévisibilité même l’étendue du désastre.

Déjà en 1986, dans un livre qui mérite sans doute d’être relu, « Les racines historiques de l’Etat duvaliérien » Michel Rolf Trouillot tirait la sonnette d’alarme. Ce pays disait-il est arrivé au bout de ses échéances. « Il y avait un moment, inscrit dans le système, où les gouvernants et les marchands auraient tellement purgé cette paysannerie qu’il n’y aurait plus rien à accaparer sans forcer le peuple à la pauvreté la plus abjecte »[1]. Et plus loin, « Les problèmes économiques empireraient, les contradictions sociales se corseraient, et la politique passerait dessus, mettant à l’écart la paysannerie, mais renforçant dans un espace de plus en plus réduit, l’acharnement de la compétition urbaine. »[2]

Vingt six ans après ces constats, les échéances sont là avec pour conséquence grave, l’extrême vulnérabilité du pays tout entier. Dans une publication récente de janvier 2012, « Haïti réinventer l’avenir », Nathalie Barrette et Laura Daleau, deux géographes québécoises, écrivent ceci : « Haïti est sans contredit une terre de risques… Pratiquement tous les risques se retrouvent sur le territoire haïtien, mais on remarque que dominent les risques naturels (géophysiques, hydrométéorologiques…), pour la plupart à la source des autres types de risques (sanitaires, alimentaires…). En effet un risque naturel, comme une inondation, peut facilement engendrer un risque sanitaire qui, à son tour, peut conduire à un risque politique et social. »[3]

Effectivement, il pleut tous les jours à Port-au-Prince et sur de larges régions du pays depuis plus d’un mois, avant même la saison pluvieuse et la saison cyclonique, et chaque jour on compte les têtes de bétail perdues, les champs inondés, les rues défoncées, les ravins engorgés, lorsque ce ne sont pas des vies humaines que les pluies emportent dans un glissement de terrain, une coulée de boue, une crue de rivière ou une inondation. Il suffit de lire les bulletins d’information de l’Observatoire de la Sécurité Alimentaire[4] publiés tous les mois département par département, ou celui de la Direction de la Protection Civile[5], pour être frappé par la récurrence des mots et expressions suivantes : situation précaire, récoltes perdues, intensification de la production de charbon de bois, maladies, augmentation des cas de choléra, déficit hydrique, hausse des prix, malnutrition chez les enfants, « grangou », envahissement de produits « pèpè », les rejets des pays développés. Il n’existe pas un coin du pays qui ne soit touché par l’extrême vulnérabilité environnementale, sanitaire, alimentaire, avec tout ce que cela entraîne comme effets aggravants de la non-maîtrise de l’espace-temps.

Et voilà que surgit encore et encore l’éternelle question : comment en sommes-nous arrivés là ?

Sans vouloir faire un détour par l’histoire, détour qui pourtant s’imposerait puisqu’il permettrait de mettre en lumière les ruptures mais surtout les continuités de notre trame historique, il n’est pas superflu de rappeler quelques éléments-clés qui tentent d’apporter une explication sur la vie politique, économique et sociale du pays dans ses turbulences, ses tentations totalitaires mais aussi ses rêves et ses planches d’espérance. Tentative pour comprendre le dérèglement institutionnel et le délitement social actuels qui à leur tour expliquent largement l’ampleur de la catastrophe et de ses conséquences.

Déjà depuis les années 1960, l’économiste français Paul Moral, auteur d’un livre qui avait marqué l’époque,  Le paysan haïtien, Etude sur la vie rurale en Haïti[6],  alertait, quelque peu comme le fera plus tard Michel-Rolf Trouillot, sur le poids de la rente extraite de la paysannerie dans l’économie haïtienne et de ses conséquences désastreuses en regard du fait qu’aucun investissement n’en assurait la stabilité. Si la famille paysanne, repliée dans les piedmonts et les montagnes, dispersée pour fuir les rigueurs du nouvel Etat fortement militarisé, faisait pour la première fois l’expérience de la vie privée, son poids démographique a augmenté rapidement, passant d’environ un demi million au moment de l’indépendance à plus de quatre millions au milieu du 20ème siècle. Et le verdict de Moral est sans appel : l’équilibre population/ressources est dorénavant rompu, le paysan haïtien aura de plus en plus de difficultés à nourrir sa famille dans les conditions actuelles d’exploitation. Les politiques de dérégulations et d’ajustements structurels imposées et acceptées plus tard au cours des années 1980, continueront d’exacerber la dégradation et de réduire la production nationale à une peau de chagrin. Les effets s’en ressentiront dans le monde urbain aussi bien que dans le monde rural.

L’exode vers les villes, vers les pays étrangers commencera dans une division régionale du travail qui dure encore depuis l’occupation américaine de 1915. Haïti a été et est encore considéré comme un réservoir de main-d’œuvre à bon marché. Il existe dans ce pays de montagnes plus de 100 000 hectares de terre arables non exploitées, pourtant aucun investissement (ou si peu) ne se fait dans l’agriculture mais des millions sont investis dans des parcs industriels pour des usines de sous-traitance. Résorber le chômage de cette manière occupe bien sûr une partie de la main-d’œuvre surtout féminine, mais vu la volatilité de ce secteur, son caractère exogène et l’absence de mobilité sociale qui le caractérise, saurait-il être le modèle économique susceptible d’assurer un développement durable ? Je ne le crois pas.

Le paysan haïtien, condamné à cultiver une terre de plus en plus improductive équipé de sa seule houe coloniale, apprendra certes, à s’organiser sur un mode revendicatif sous la poussée de certaines églises et d’institutions de la société civile engagées dans les mouvements sociaux, mais aussi, il migrera vers les villes, en masse, et la capitale recevra en continu les lots les plus importants de nouveaux venus à la ville qui constituent aujourd’hui la masse de jeunes chômeurs, ou de ceux engagés dans l’informel qui n’est autre chose que du chômage déguisé.

Ecoutons ce que nous dit Jean Goulet dans un texte intitulé, « La gestion urbaine aux antipodes de la technocratie : L’expérience des bidonvilles de Port-au-Prince », publié en 2004 dans Démocratie et management local : « Il n’est pas surprenant qu’Haïti soit considéré comme l’Etat le plus pauvre des Amériques, l’Etat le plus pauvre de l’hémisphère nord, et occupe le 146ème rang sur 173 dans le classement des Nations Unies… La zone métropolitaine de Port-au-Prince, qui a fini par englober dans un même continuum urbain la quasi-totalité des villes et villages de la baie de Port-au-Prince, abrite aujourd’hui selon les dernières estimations quelques 2 500 000 personnes.  Il n’y en avait guère plus de 700 000 il y a 20 ans. »
Et il continue : « Ce sont ainsi 350 bidonvilles érigés dans 119 quartiers appartenant à 6 communes qui se répartissent dans toute la zone métropolitaine. Ces bidonvilles regroupent environ 1 600 000 personnes. Il ne s’agit donc pas de rassemblements plus ou moins homogènes de quelques dizaines ou centaines d’abris de fortunes, mais bel et bien de véritables cités dans la cité : 200 000 personnes à Cité Soleil, 100 000 personnes à Cité l’Eternel, 80 000 personnes à Fort National, 365 000 personnes à Christ Roi/Nazon, et d’autres agglomérations plus petites comme Bon Repos 4 000 habitants, Thor avec 20,000 habitants et Péguy Ville avec 6 000 habitants. Toutes ces cités ont comme caractéristiques communes de présenter l’image d’un développement anarchique et non structuré, de ne pas posséder de lotissement précis, d’être pauvres en infrastructures publiques (quand ce n’est pas leur absence totale), d’héberger une population très majoritairement pauvre et analphabète, d’afficher une densité d’occupation très élevée, et d’occuper des espaces très souvent dégradés et peu propices à l’habitation (zones à risques, anciens dépotoirs, terres basses inondées, pentes prononcées, etc.)[7]

Bien que le propos de cet auteur est de nous montrer que le bidonville est une forme d’appropriation de l’espace par les plus pauvres, et constitue ainsi la résultante d’une rente foncière peu élevée pour des terrains peu attrayants qui rencontrent les exigences ou les possibilités des ménages à faibles revenus, il insiste sur le fait que le bidonville est aussi la conséquence du vide institutionnel et de l’indifférence étatique. 

Les données fournies nous indiquent que plus des deux tiers de la population de la zone métropolitaine de Port-au-Prince vivent dans ces conditions, avec pour corollaire qu’une partie de l’autre tiers vit dans des bidonvilles de luxe, sans planification urbaine, sans voirie, sans trottoir, dans un enchevêtrement de rues et de ruelles au tracé sinueux et aléatoire concentrant autour des villas cossues des satellites urbains dans lesquels se retrouvent souvent installée, la flopée de domestiques au services des plus nantis.  Et ce jeu de miroirs entre les riches et les pauvres renvoie en de multiples images, l’étendue du déséquilibre social et du chaos urbain.

Dans de telles conditions, si le tremblement de terre n’a pas choisi ses cibles, il semble bien que dans son aveuglement même, il aura frappé les zones les plus fragiles à grande concentration démographique, et c’est dans ces quartiers que l’on comptera le plus de morts ; et en disant cela, il ne s’agit nullement de minimiser les pertes en vies humaines que l’on a enregistrées dans l’Administration publique, la PNH, et dans les nombreuses familles qui ont vu disparaitre des êtres chers en moins de 40 secondes. Morts pour la plupart sans sépulture, sans processus de deuil, on y reviendra.

Je me permets ici de faire appel à un important ouvrage de André Marcel d’Ans, publié en 2005 sur le Honduras après l’ouragan Mitch, intitulé Ecologie politique d’un désastre : « Aborder l’étude d’une catastrophe dans l’optique de l’écologie politique, écrit d’Ans, revient à écarter d’emblée l’idée que la dite catastrophe puisse être considérée comme naturelle. » Il est évident que des facteurs météorologiques et sismiques peuvent provoquer un enchainement de désordres à effets catastrophiques, mais comme le signale l’auteur, « A tout moment au contraire, nous voyons des facteurs d’ordre économique, démographique, sociologique, psychologique ou culturel interférer dans ce cortège de conséquences, sans qu’il soit toujours forcément possible de décider s’il s’agit de causes ou d’effets tant chacun de ces facteurs se trouve pris dans un écheveau d’interactions croisées, constitutives du lien vital que toute société est amenée à négocier avec son cadre matériel, en partie façonné par elle, et faute duquel les agissements de ceux qui la composent ne pourraient avoir aucune réalité. »[8]

Mon propos n’est pas de m’étendre sur l’écologie politique du tremblement de terre du 12 janvier 2010, mais bien de montrer que dans ce cas spécifique comme dans d’autres, la catastrophe ne peut être considérée comme « naturelle ». Les éléments d’analyse proposés plus haut ont été avancés pour le rappeler. A cela il faut ajouter les mises en garde de l’ingénieur Claude Prépetit qui semblait prêcher dans le désert, tout seul, en annonçant l’imminence d’un tremblement de terre, et en alertant sur l’impréparation chronique du gouvernement et de la population à y faire face. Comme l’a rappelé, Roberte Momplaisir dans le Liminaire du livre que Prépetit vient de publier, La menace sismique en Haïti, hier, aujourd’hui et demain : « Je connais Claude Prépetit depuis trente-cinq années. Il n’a jamais été un ‘grand diseur’. Et pourtant depuis 2003, il parle, il répète, il se répète. On n’a commencé à bien l’écouter que le 13 janvier 2010. Quand trop de voix se sont tues. »[9]

  • Alors, en regard de ce qui vient d’être dit plus haut, comment poser la problématique de la reconstruction et du rôle de la communauté internationale, lorsque l’on sait qu’en plus tous les facteurs de vulnérabilité qui préexistaient à la catastrophe ont été exacerbés par le séisme du 12 janvier :Instabilité politique due au dysfonctionnement de l’appareil d’Etat, au dysfonctionnement des institutions, à la corruption (et l’Etat n’est pas le seul lieu de corruption), à l’absence de planification et de cadre juridico-politique adapté, à l’absence d’une puissance publique susceptible d’exercer ses prérogatives régaliennes, à la perte de champs de souveraineté, à la faible capacité à gérer les crises.

  • Déconnexion entre l’administration publique et la population ; la dépendance économique aggravée par la crise financière internationale, l’économie de rente, la non-coordination de l’aide, la primauté de l’aide humanitaire sur les investissements productifs, l’absence de politique de crédit, l’absence de médiations entre le citoyen et l’Etat réduisant les revendications populaires pour l’accès aux services sociaux de base à de pures chimères.

  • Retrait apparent des organisations de la société civile qui semblent avoir toutes les peines du monde à retrouver le dynamisme qui les caractérisait il y a de cela quelques années. On pourrait en dire autant des partis politiques et de l’université. Mis à part quelques exceptions, les mouvements de femmes par exemple (que je tiens à saluer pour le travail remarquable réalisé au cours des vingt dernières années, entre autre dans leurs luttes pour changer un cadre juridique discriminatoire à l’égard des femmes), les organisations de la société civile sont quasi-absentes de la scène politique, et on a peine à croire par exemple, que le retour de l’ex Président-à-vie Jean-Claude Duvalier n’ait créé aucun mouvement de protestation sinon de la part des quelques victimes de la dictature qui ont eu le courage de porter plainte.

  • Densité de la population, étendue du bâti, absence de programmes de préventions des risques, absences de consignes claires si bien que les constructions précaires se reconstruisent comme avant le séisme.

  • Absence de plan commun de reconstruction agréé par les entités étatiques concernées, chacun prenant des initiatives isolées , le Ministère de l’économie et des finances ayant fait appel à la Fondation du Prince Charles, le Ministère de la planification et de la coopération externe à la firme canadienne IBI-DAA, et la mairie de Port-au-Prince à une firme privée haïtienne.

  • Manque absolu de transparence dans l’attribution des contrats, des programmes d’aide, des financements de la myriade d’opérateurs, de sous-opérateurs, d’ONG qui font et défont, au gré des idéologies qui les portent, et surtout au gré des financements disponibles, ignorant les pouvoirs publics, s’installant de manière totalement immorale dans l’humanitaire et l’éphémère.

La liste serait encore longue. Ecoutons ce que nous dit OCHA dans son dernier Bulletin Humanitaire, Haïti, No. 17, 1er mai 2012 :

« L’aide humanitaire mise en œuvre par la communauté internationale au lendemain du tremblement de terre n’a pas permis d’accroître la résilience haïtienne. » C’est le constat tiré par l’étude « Evaluation de l’aide humanitaire en Haïti sous l’angle de la résilience » présentée le 23 avril à Port-au-Prince par l’Université d’Etat d’Haïti en partenariat avec la Disaster Resilience Leadership Academy de l’Université Tulane des Etats-Unis.

Le rapport indique que l’ampleur du séisme a provoqué un élan de solidarité sans commune mesure et que le financement des efforts humanitaires pour appuyer cette réponse a été nettement supérieur par rapport aux dix dernières années. En 2010, Haïti a reçu plus de 3 milliards d’aide humanitaire contre 42 millions en 2003.

Toutefois, précise l’étude, deux ans après le séisme, les Haïtiens n’ont pas recouvré l’intégralité des ressources qu’ils avaient perdues lors du tremblement de terre. Plus de la moitié des résidents des camps possèdent moins de ressources aujourd’hui qu’avant le 12 janvier. »[10]

C’est dire que le processus d’appauvrissement est réel, et les millions déversés, et les satisfecits que se donnent les bailleurs ne semblent pas impacter positivement et durablement sur la vie de la population, particulièrement des plus pauvres. A bien regarder, il y a là quelque chose qui souvent frise l’obscène.

Le rapport souligne également que les mauvaises conditions de vie dans les camps ont facilité la détérioration de la santé psychosociale des résidents pour qui les séquelles de la catastrophe du 12 janvier étaient encore présentes. Quelque 35% de la population adulte des camps souffrent de stress psychologique, selon les données de cette enquête.
J’avais dit plus haut que je reviendrais sur la question du deuil. Laënnec Hurbon et Edelyn Dorismond sont deux auteurs qui à mon avis ont traité récemment de la question avec le plus d’acuité. Dorismond en proposant tout une analyse de ce qu’il nomme la culture post-traumatique et qu’il définit ainsi : « c’est la culture d’une société bouleversée par des événements dramatiques particuliers ayant déstructuré les repères symboliques ou géographiques, fendant la société dans son tissu de solidarité, à savoir le rapport entre les vivants eux-mêmes et leur rapport aux morts ou aux mourants. La culture post-traumatique est en panne d’orientation dans l’espace symbolique aussi bien que dans l’espace géographique. »[11]

Et il conclut : « Exister dans les catastrophes reviendrait à encourager le parti pris symbolique en faveur de l’être, de la vie, du bien-être, à l’œuvre dans la culture et la société, par une politique responsable, une politique qui promeut le vivre-ensemble en instituant une nouvelle symbolique du deuil collectif, un programme d’accueil aux handicapés, aux familles démembrées. Bref une politique qui pourra instituer, c’est-à-dire créer des structures fermes pour résister aux effets liquéfiants, déstabilisants, tant du point de vue sociologique, anthropologique que psychologique, du tremblement terre. »[12]


Et Laënnec Hurbon d’ajouter en insistant sur la question de la mémoire : «D’une catastrophe à l’autre, la question de la mémoire demeure la croix du projet de reconstruction de la capitale. Toute culture est en effet fondée sur un mode particulier de rapport entre les vivants et les morts, en le visible et l’invisible. Production continuelle de sens, élévation de soi vers une condition plus humaine, la culture ne peut jamais se déployer dans l’inattention aux traces du passé… La culture devrait donner le ton à la reconstruction pour sortir de la politique traditionnelle dominée par l’improvisation et la corruption, mais tout concourt à montrer que la culture est pour le moment le pilier absent de la reconstruction. »[13]

Et nous savons tous le rôle et le poids de la culture et de la créativité dans notre histoire. 


Faut-il croire alors que cette reconstruction dont on a tant parlé n’est elle aussi que pure chimère ? Dans un article paru dans un nouveau magazine qui vient tout juste de sortir, L’Observatoire de la reconstruction, Alain Gilles dans « Reconstruire avec des outils d’autrefois » a relevé que dans le document de 120 pages sur l’évaluation des dommages, Haïti, PDNA du tremblement de terre, le mot reconstruction est utilisé 192 fois. Dans le plan d’action de 54 pages du même mois (mars 2010), le terme refondation est repris 40 fois et celui de reconstruction 58 fois. La refondation devait être territoriale, économique, sociale, et institutionnelle.[14]


Qu’en est-il, deux ans après, suffit-il de se gargariser de mots ?

Après avoir relevé les immenses difficultés de la situation actuelles, je me dois d’insister sur le fait qu’il existe encore quelques poches d’espérance dans ce pays. Oui, il existe encore quelques organisations qui se battent quotidiennement pour maintenir la flamme d’un avenir meilleur. Il existe encore quelques individus, hommes et femmes qui ne désespèrent pas, par éthique, par engagement, par conviction qu’un monde meilleur est possible, chez eux, et qui se battent contre les préjugés, contre l’obscurantisme et la médiocrité, pour la promotion des valeurs de respect, de dignité, des droits fondamentaux de la personne. Il existe aussi quelques organismes de coopération internationale qui ont cheminé et cheminent encore aux côtés de ces organisations, accompagnant, finançant solidairement. Et lorsque dans les pays développés qui soutiennent ces organismes de coopération internationale surviennent crise financière, revirements politiques, coupures drastiques, les conséquences sont graves chez eux, mais aussi chez nous. C’est la raison pour laquelle le combat doit se mener aussi bien chez eux (chez vous) que chez nous, en Haïti.

Je dirai pour terminer qu’aujourd’hui il nous faut solidairement trouver ensemble des solutions aux crises financière, économique, sociale, environnementale, alimentaire, morale d’un système en bout de course. Dans le débat et la confrontation d’idées.

La construction, je dis bien construction, de cet autre Haïti, de cet autre monde, je le dis et le répète souvent, passe par un nécessaire changement de paradigme :

·        Dans le domaine de l’économie sans lequel le développement durable n’est pas possible, pour sortir de ce qu’Alain Gilles nomme « la raison rentière »[15].

·        Dans celui de la gouvernance, donc du politique pensé sous l’angle du bien commun et de l’intérêt collectif pour sortir du clientélisme, du népotisme, pour inscrire la citoyenneté au cœur des politiques publiques et des actions de l’Etat.

·        Dans celui de l’éducation et de la santé pour une vraie maîtrise de l’environnement.

·        Dans celui de la responsabilité et de l’action citoyenne pour fédérer les énergies et créer de nouveaux modèles pour les jeunes.

Pour cela, il nous faut continuer le combat, mais aussi partager l’espérance.

Je vous remercie. Mèsi anpil !


[1] Michel Rolf Trouillot, Les racines historiques de l’Etat duvaliérien, Editions H. Deschamps, Port-au-Prince, p. 98.
[2] Idem, p. 101.
[3] Haïti, Réinventer l’avenir, Editions de la Maison des sciences de l’homme, Paris, 2012, Editions de l’Université d’Etat d’Haïti, 2012 p. 55.
[4] Observatoire de la sécurité alimentaire, mars 2012
[5] Bulletin de la Direction de la Protection Civile, Rapport de situation No. 5, avril 2012
[6] Paul Moral, Le paysan haïtien, Etude sur la vie rurale en Haïti, Maisonneuve et Larose, Paris, 1961
[7] Jean Goulet, « La gestion urbaine aux antipodes de la technocratie : l’expérience des bidonvilles de Port-au-Prince », in Démocratie et management local, 1ères  rencontres internationales, sous la direction de Robert Le Duff et Jean-Jacques Rigal, Dalloz, 2004, pp 247-248.
[8] André Marcel d’Ans, Ecologie politique d’un désastre, Le Honduras après l’ouragan Mitch, Editions Karthala, 2005, p. 5
[9] Claude Prépetit, La menace sismique en Haïti, hier, aujourd’hui et demain, Editions de l’Université d’Etat d’Haïti, p.14.
[10] OCHA, Bulletin humanitaire, Haïti, No. 17, 1er mai 2012.
[11] Edelyn Dorismon, « Exister dans les catastrophes : souffrance et identité » in Haiti, Réinventer l’avenir, op. cit. p. 205
[12] Idem, p. 215
[13] Laennec Hurbon, « La culture ou le pilier absent de la reconstruction » in « L’Observatoire de la reconstruction », Numéro 1, mai 2012, p. 11.
[14] Alain Gilles, « Reconstruire avec des outils d’autrefois » Idem, p. 18.
[15] Alain Gilles, “La raison rentière », in « Rencontre, Revue haïtienne de société et de culture », Numéro 24-25, janvier 2012, p.62.

Wednesday, May 9, 2012

Mario Dupuy: Unfit to serve as Haiti’s Minister of Culture by Michael Deibert


It is disgusting that a country that continually produces some of the greatest novelists, poets, filmmakers, painters, musicians and other artists in the world should have as the lead representative of its culture a discredited political apparatchik and quisling of authoritarian rule such as the man proposed http://radiokiskeya.com/spip.php?article8802 yesterday by Haiti's new Prime Minister, Laurent Lamothe.

Mario Dupuy, as the Secretary of State for Communications during the second term of Haitian President Jean-Betrand Aristide - a man branded by the press-freedom organization Reporters Sans Frontières as a predator of press freedom in May 2002 - served as one of the most public faces of a regime dedicated to strangling, rather than encouraging freedom of speech and freedom of expression.

“Impunity has been at the root of the authorities' strategy of cowing the media,” Reporters Sans Frontières said in its press release http://www.ifex.org/international/2002/05/03/rsf_publishes_annual_report_on/ at the time, directly referring to the Aristide government’s active blocking of the investigation into the 3 April 2000 murder of Radio Haiti Inter journalist Jean Dominique and the 3 December 2001 murder by a pro-government mob of Radio Echo 2000 reporter Brignol Lindor http://cpj.org/killed/2001/brignol-lindor.php in the town of Petit-Goâve.

“At best, [Aristide] is protecting the killers, at worst he is involved in the murder himself,” RSF continued in its statement.

On a 3 March 2002 radio broadcast, Dominique's widow, the journalist Michèle Montas, said http://deiberthaiti.blogspot.com/2011/04/is-another-assassination-of-jean.html that “all the resources, i.e. logistical, technical, and financial made available in this judicial case by the preceding government have been cancelled.”

Such was the commitment to freedom of expression of the government that Haiti’s newly proposed Minister of Culture served.

And yet there is more.

How can those of us who were present in Haiti from 2001 until 2004 forget the role that Mario Dupuy played in legitimizing violence against demonstrators and the press?

To recall but a few examples:

On 3 December 2002, the first anniversary of the murder of the journalist Brignol Lindor,  after several thousand Aristide supporters had chased away anti-Aristide demonstrators with stones and bottles and hit them with metal bars and whips in Place d’Italie in the heart of Port-au-Prince, when asked about the violence Dupuy breezilyconcluded http://www.michaeldeibert.com/articles/reuters/article5.html that "this is democracy. People, including government supporters, may take part in any march they want to.”

In September 2003, Dupuy was one of numerous Aristide government officials who, during simultaneous television and radio interviews,announced http://www.rnddh.org/article.php3?id_article=112 that the regime they served would  move to revive a presidential decree passed by dictator  Jean-Claude Duvalier on 17 October 1977, which stated that “broadcast information must be precise, objective and impartial, and must come from authorized sources which are to be mentioned when broadcasting. Those who are responsible for the broadcasts have to control the programs to ensure that the information—even when it is correct—cannot harm or alarm the population by its form, presentation or timing. The broadcast stations will provide a channel for the broadcasting of official programs, if so required by the public powers....” This was a naked assault on articles 28-1, 28-2 and 245 of Haiti’s 1987 constitution, which forbids censorship and protects free speech and journalistic practices.

On 10 February 2004, as the Aristide government was teetering amid massive street protests http://www.youtube.com/watch?v=e51qk-hgJGI&feature=youtu.be against its rule and a rebellion initiated by a formerly loyal street gang in the northern city of Gonaives, Dupuy said http://mail.freedomarchives.org/pipermail/news_freedomarchives.org/2004-February/000138.html /he was “saddened by the behavior of certain journalists who he claimed are working as press attachés for the terrorists, blindly relaying the false information that they give them in an attempt to psychologically destabilize the police and the general population.”

In the weeks that followed before Aristide’s 29 February flight into exile, journalists, both foreign and Haitian, were routinely attacked and robbed by armed government partisans. I personally had a 9 millimeter pistol pointed at my head head and a shotgun trained on me by armed government supporters. A number journalists suffered much worse fates.

This is the person that Haiti’s President Michel Martelly and Prime Minister Laurent Lamothe  think is the man to represent Haitian culture to the nation and the world? This in a country whose writers from Jacques Roumain to Lyonel Trouillot, whose musicians from Nicolas Geffrard to the band Boukman Eksperyans and whose artists from Edouard Duval-Carrié to Stevenson Magloire have always most eloquently expressed themselves in the key of opposition to tyranny?

Amnesia may be the politically correct posture to adopt in Haiti today, to pretend that all of the country’s history began with the devastating earthquake of 12 January 2010. But as someone who came into office as a political novice promising a break from Haiti’s traditionally corrupt political class, President Martelly and Prime Minister Lamothe owe the Haitian people better than the attempted recycling of one of the tainted elements of Haiti’s painful past.
http://deiberthaiti.blogspot.com/2012/05/mario-dupuy-unfit-to-serve-as-haitis.html

Saturday, December 17, 2011

Nouvelles réflexions utiles de sortie de crise par Agronome Michel William


Le présent article est un nouvel essai de convier les élites haïtiennes á prendre du recul pour trouver les voies et moyens d’une sortie définitive de la  crise en les invitant á  réfléchir une fois de plus sur le pouvoir, la nature du pouvoir  et la constitution de 1987.On va essayer de s’arrêter á  quelques définitions  de certains mots clefs pour mieux fixer certaines idées.

Qu’est -ce que le pouvoir et qui détient le pouvoir en général ?

Le pouvoir est la faculté  de manipuler la société. Détiennent le pouvoir tous ceux-là qui  ont les moyens d’influencer la population pour la porter á  faire quelque chose .Ce quelque chose  peut être á  leur  profit, au profit d’un groupe, d’un caste ,d’un individu ou de la collectivité. Un  parlementaire est un pouvoir. Un ministre est un pouvoir. Un président est un pouvoir ,un écrivain est un pouvoir. Un animateur  d’une émission de radio est un  pouvoir. Un homme d’affaire est un pouvoir. Chacun  de ces groupes essaie de manipuler l’opinion  en vertu de ses objectifs et de ses desseins .Chacun  de ces groupes de par la position qu’il occupe dans l’échelle de la hiérarchie sociale et économique détient une partie de ce pouvoir et cherche inévitablement á  l’en abuser.Une fois qu’il est reconnu  de posséder  ce brin de pouvoir ,il se  comporte comme tel. Ceci est possible en l’absence de normes.

Ces derniers temps j’ai pris un véritable plaisir á écouter les grandes vedettes de la presse parlée haïtienne .J’ai également analysé les éditos des deux plus grands journaux édités en Haïti. .En y réfléchissant, j’ai observé un recul et me suis évertué á  comparer le contenu de mes articles au regard des desseins  que caresse chacun de ces directeurs  d’opinion . Je ne sais  pas  si moi-même je crée cette sensation de puissance et de certitude  dans mes articles, mais en les écoutant ou en les lisant , ils m’arrachent ce crédit  de puissance dont faisait preuve le président  Jean Bertrand Aristide au fait  de son pouvoir quand il disait «  Quand je veux  je peux ».

De nos jours, chaque acte posé par l’exécutif est analysé á  la loupe par la presse suivie d’un ensemble de recommandations qui semblent dire  que c’est eux qui détiennent la solution du problème. Le fond de l’éducation, la nomination des délégués, les voyages, l’envoi d’argent au passage, les six cent millions d’Aba grangou, la vente d’engrais au rabais, les quatre cent millions  de joyeux noël, l’affaire Bélisaire , la nomination des directeurs généraux, le choix des membres du cabinet . La presse y voit partout du grabuge causé par le président  mais se refuse á  faire le moindre effort pour expliquer et s’expliquer les accros commis par le président. L’homme veut bien faire et implore la compréhension des autres ou mieux le support des autres pour y arriver. Martelly ne cherche pas la confrontation criminelle.

Notez bien que je ne critique personne .Je n’accuse personne  d’avoir raison ou d’avoir tort. Je cherche seulement á  expliquer la structure du pouvoir, la compréhension de la manifestation du pouvoir que chacun croit détenir sur la société  haïtienne. Je voudrais en me penchant sur cet article  emmener  les concitoyens haïtiens qui me lisent á  réfléchir une fois de plus   sur les vrais moyens de sortie de la crise.
Pour répéter quelqu’un il n’y pas á proprement parler de crise nouvelle. La crise est la déjà. Elle existait  au milieu de nous. Elle  nous minait. Elle nous divisait. Il y a seulement l’apparition d’éléments  nouveaux qui l’ont exacerbée..

Pour éviter des dérives préjudiciables  dans l’exercice de ce pouvoir les grands érudits  ont  inventé la constitution

Qu’est ce que la constitution et que recherche le peuple dans la promulgation d’une constitution ?

La constitution  dit on ,est une sorte de loi mère qui vient définir les relations  entre les gouvernants et les gouvernés. C’est le contrat social. Dans une constitution sont fixés les principes  qui visent la pacification de la société. Pacification de la société  signifie établir les critères de base  pour la rédaction et la promulgation  des lois qui viendront formater des institutions qui serviront de remparts  contre les tentations  des choisis d’abuser le pouvoir , de faire du tort á  la population en prenant des mesures qui les permettent de s’approprier les richesses qui devraient profiter á  tout le monde. Une constitution est faite pour protéger la société. Elle est faite pour garantir les droits de tous. La première qualité d’une constitution est de faire l’acceptabilité  au niveau de la population. Sa  première utilité est de pouvoir faire l’unanimité au niveau des institutions á  créer  pour garantir une égale liberté des citoyens, une égale jouissance des droits reconnus á  chaque citoyen et un respect parfait des prescrits qui violeraient l’intérêt  collectif.

Partant de ces principes une constitution qui dans sa rédaction violerait les droits des individus au profit des autres  n’est pas une constitution. Une constitution qui diviserait les gens  au lieu de les réunir  n’est pas une constitution. Un amendement concocté dans la ruse , dans les salons du président de la république et interdit de discussion en public n’est pas un amendement. Un amendement dont ne partage pas les partis politiques d’où seront recrutés les leaders appelés á diriger le pays  n’est pas un amendement Un amendement qui ne fait pas l’unanimité des partis politiques avant sa promulgation est un élément de futurs troubles pace que son contenu aura été  seulement le projet partisan de ceux-là qui l’ont écrit pour en jouir  les privilèges. C’est pourquoi il est inscrit dans toute constitution que l’amendement voté  ne serait mis en application que par le gouvernement  et par la législature qui n’étaient pas associés á  sa rédaction et á sa promulgation. C’est pourquoi aussi je digère mal les appréciations de certaines élites qui se disent constitutionalistes et qui sont incapables d’expliquer á  la grande masse les avantages et les désavantages de la constitution de 1987 ou les vices de la constitution amendée.

Est-ce que la constitution de 1987 et son amendement répondent á ces préoccupations de la société haïtienne?

Pour répondre á  cette question, il appartient á  la société  haïtienne, dans ses grandes composantes  de se prononcer en toute liberté et en connaissance de cause  sur les grands principes inscrits á  l’intérieur de la dite constitution ou de ce dit amendement. Les idées inscrites dans l’amendement doivent pouvoir être discutées en toute liberté  et ouvertement dans tous les coins de la république  pour s’assurer que les idées   retenues  sont partagées par  la majorité de la population. Elles ne devraient pas poser de problèmes entre les partis politiques. Si ces derniers qui ont des yeux d’éditeurs pour lire un texte n’en  veulent pas , que dire de la masse de la population appelée seulement á obéir aux lois ?

La constitution de 1987  dans sa version originale  ne répond pas á  ces  préoccupations parce qu’elle a été faite  contre  le régime présidentiel et au profit d’un législatif  qui a le pouvoir de bloquer  l’exécutif. sans laisser la possibilité á  ce dernier pouvoir d’exercer  des recours .On se rappelle que le régime militaire post Jean Claude  et le groupe « One respe  konstitisyon » ne l’avaient pas acceptée non plus. Sa version a été imposée par la population après d’incessants appels á  la radio qui avaient su canaliser les énergies mobilisées  pour la faire accepter par un referendum. Son applicabilité  même partielle ou sa violation ont  été obtenues au prix de la corruption des parlementaires.

L’amendement de la constitution de 1987 fait avec ruse  dans la précipitation et en secret n’a pas été le consensus de la  volonté populaire  qui avait ras le bol des prestations de ses dirigeants. de 1986 á 2010. Il  a été fait á l’instigation de Mr Préval qui accusait la constitution de 1987  d’être une source d’instabilité  pour lui et pour tous les gouvernements qui l’ont violée  pendant les vingt cinq années  de son application .Elle a été manipulée par le groupe majoritaire CPP gagné au dessein du président Préval. Elle a été reformatée par l’INITE devenu GPR qui y a inscrit sa conception du pouvoir alors que l’élection de ces parlementaires  n’a pas été le choix du peuple astucieusement écarté La version amendée et votée a été massacrée officieusement  avant d’être publiée .Tout ceci pour faire échec au nouveau gouvernement.

L’exécutif de Martelly qui ne rentrait pas dans les desseins machiavéliques de l’INITE devient un obstacle á  la mise en place de l’amendement. Celui-ci a du subir de nouvelles corrections criminelles avant d’être publiées officiellement pour essayer d’étouffer dans l’œuf  les prétentions éventuelles du nouvel exécutif .Le blocage de la formation du gouvernement de Martelly tire sa source dans l’amendement de la constitution qui plait au groupe des parlementaires sans plaire á l’exécutif, au   judiciaire et aux collectivités territoriales. Le vers est dans le fruit.

La presse haïtienne, une autre structure du pouvoir,  qui se rappelle les dures batailles livrées contre les dictatures des Duvalier et des Aristide et la quantité de personnes tombées au cours de ces luttes pour arracher la liberté d’expression anticipe déjà les conséquences d’un retour inopiné du  duvaliérisme et du militarisme criminel. Elle  raidit  sa position. On sent dans le « di’m ma di’w » du 15 décembre une tentation peureuse du journaliste   de refaire l’alliance  de 1990 á l’invitation des rescapés de fanmi Lavalas. Le journaliste serait prêt contre lui même. Il serait prêt á y souscrire moyennant des confessions, des témoignages, des regrets qui ne suffiraient pas encore pour rééditer l’aventure de 1990 suite aux coups bats inoubliables reçus dans la lutte pour la confiscation du pouvoir. De gros nuages  s’amoncèleraient á l’horizon.

Pour survivre á ces nuages noirs du ciel politique haïtien, le gouvernement et les Nations Unies sont  en train de faire des dépenses de prestige  rien que pour créer un climat d’apaisement Elles seront comptabilisées á la fin de l’année dans le passif de ces deux institutions qui n’en ont pas le choix. Ces dépenses sont sans cesse remises en cause  par le parlement ,  par la presse et par  les partis politiques á la veille des élections. Du coté de l’exécutif ,on essaie de jouer tantôt avec les députés, tantôt avec les sénateurs tantôt avec les magistrats ,tantôt avec les casecs pour masquer le véritable problème qui est la difficulté de gouverner avec les meilleures volontés  et   l’impossibilité d’écrire une nouvelle constitution pour répondre aux besoins désormais plus qu’éclairés de la population  nés des expériences condamnables du duvaliérisme et de lavalas. Le groupe des parlementaires défend mordicus ses prérogatives partisanes  inscrites dans l’amendement et s’oppose á tout changement qui viendrait rétablir l’équilibre des trois pouvoirs au profit de la majorité.. Ces jeux vilains révoltent la presse . Etant donné  que les Nations Unies  coresponsables de l’imbroglio politique  ne veulent pas être interpellées, elles semblent se  soumettre á la fausse volonté  de l’exécutif et du législatif dans la recherche de compromissions qui enlisent d’avantage le peuple haïtien.

Les véritables hommes clef de la crise d’aujourd’hui  sont la presse haïtienne  et la société civile qui doivent arrêter de faire le show biz pour exiger de l’exécutif et du parlement  l’annulation de la constitution de 1987,celle de  son amendement, la rédaction et la promulgation d’une nouvelle constitution qui placerait l’exécutif de Martelly devant ses nouvelles responsabilités discutées, le législatif devant ses nouvelles  responsabilités discutées, le judiciaire devant ses nouvelles responsabilités discutées, la presse devant ses nouvelles responsabilités discutées. Tout ceci bien entendu  á  la lumière des contraintes et de dispositions transitoires posées par les conditions de l’investissement massif du capital étranger  impliqué dans la reconstruction du pays. Il n’y a aucune raison d’avoir peur de Martelly si on se réunit  pour le mettre sur un  chemin imposable á  tous. A mon humble avis c’est la seule façon d’éviter le retour du duvaliérisme grimaçant, du lavalas conspué et décrié, du militarisme krazezo, du prévalisme éhonté et de jeter les bases  d’une autre Haïti. Le vers est dans le fruit. Il n’y a pas d’autre façon de sortir de la crise. Il faut sortir et de la peur du duvaliérisme et de la nostalgie des quatre vingt sixards. Le redémarrage du pays est á ce prix.

Sunday, August 7, 2011

The Economist: Rush to Judgment in Haiti with Only Half the Facts by Stanley Lucas



On August 6, The Economist printed a harsh commentary on Michel Martelly’s tenure as President over the past three months, see: http://www.economist.com/node/21525402 .  Whether a result of sloppy reporting or perhaps intentional omission of facts, the article, entitled “A bitter baptism for ‘Sweet Mickey’”, seems highly biased toward Martelly’s opposition, and furthermore seems to be an effort to undermine Haiti’s fragile political transition. 

The article notes that the flawed elections are the reason for Haiti’s political deadlock over the Prime Minister and formation of the new government.  This is only half the story.  The deadlock is rooted in a fight between those Parliament who are desperate to maintain the current state of corrupt politics as usual in Haiti and those who promised and are working toward real change.

The Economist article states that Martelly only got onto the run off ballot after the OAS and “other actors stepped in and forced a recount” due to widespread fraud, but he only won with 23% of the vote.  A few facts were omitted in this analysis.  The OAS “stepped in” at the request of President Preval who realized that the Haitian people would not swallow a fraudulent election, and he needed the political cover of the regional organization.  Further, he could control the OAS result to some extent because he would have final approval as per OAS rules.  While OAS involvement contributed to addressing the fraudulent Presidential elections, the OAS left the job half undone by failing to address the fraudulent legislative elections. Hence, Parliament is gridlocked because Preval loyalists are committed to preserving the current system that benefits them.

Additionally, while Martelly won with only 23% of the vote, his current approval rating among the Haitian people stands at 73%.  Why was that fact omitted?  Rather, The Economist reports that Martelly was “pelted with plastic bottles and stones on a visit to Cap Haitian” in July in his first protest.  The Haitian police investigated the incident and found that the opposition had paid these “protestors”, a common tactic among Haiti’s opposition.  Why didn’t The Economist report that fact?

Then the article turns to questioning Martelly’s links to a former Aristide thug, and reporting negative rumors about Martelly’s two picks for Prime Minister, who have both been shot down by the Parliament.  The article notes that one of the candidates, Bernard Gousse, a former justice minister, “used the job to persecute political opponents, including some current legislators.”  This statement is based only in rumors, and has no grounding in fact.  The fact is that Bernard Gousse was investigated thoroughly by Haiti’s anti-corruption unit and found unequivocally clear of all charges.  This week the National Human Rights Defense Network http://www.rnddh.org/ which aggressively monitored human rights violations in Haiti for the past 30 years stated that Gousse never use his office inappropriately to persecute political opponents or violate human rights or the rule of law, see: http://www.hpnhaiti.com/site/index.php?option=com_content&view=article&id=3576:gousse-non-coupable-de-violation-des-droits-de-lhomme-plaide-le-rnddh&catid=1:politics&Itemid=1 And perhaps it also bears mention that the Haitian police were actually investigating those particular legislators for drug trafficking – with international support in several cases.  When the investigation got too close, they were “elected” to Congress – with Preval’s assistance – so they could not be prosecuted, se: http://solutionshaiti.blogspot.com/2011/07/inites-deadlock-last-ditch-effort-to.html In Haiti, legislators are free from judicial prosecution.  Why weren’t those facts reported?

Then the article attacks Martelly for not being a “builder of consensus” in the Preval-controlled Parliament while noting that he was actually elected for promising to break with the corrupt past.  They quote a notoriously corrupt Senator Desras as saying that Martelly “doesn’t understand cohabitation and he should realise that we were elected, too”.  The article does not note that Senator Desras’s election results had been manipulated. 

Again, Martelly’s support is 70%.  The Parliament’s support stands at 2% because Haitians see them as being illegitimately elected (several civil society groups are still challenging the results) and representative of the past Administration that failed them so miserably.  They are called Preval’s “leftovers”.  The people would revolt if Martelly went back on his promise to change the system and bowed to Parliament’s demands to retain control over key ministries and the Prime Minister.  President Martelly was elected to serve the people, and there is absolutely no appetite for consensus in these circumstances.  However, all Parliamentarians are invited to join efforts to rebuild the system and bring change to Haiti.  So far, the Parliamentarians have proven to be more devoted to preserving their power and the corrupt politics of the past, including launching massive smear campaigns against political opponents, rather than displaying any interest in joining the effort to bring real results and progress to Haiti.  Click on picture to enlarge

Martelly’s election breaks a 40-year cycle of corruption and violence in Haiti begun by the Duvaliers and continued by Jean-Bertrand Aristide and Rene Preval.  Breaking that cycle and consolidating and a new government takes time, which is something this article does not explore either. 

Frustration and impatience are running high to be sure, but most Haitians seem quite willing to give President Martelly a chance.  And few see him as the problem.  Articles such as these do little to build confidence in our fragile country, and do much to undermine the nascent beginnings of change.  Let’s hope that potential investors and the generous international community do not put too much stock in this half analysis of the Martelly Administration.  More than one million people are still sleeping in makeshift tents with the hurricane season upon us.  We can ill afford to lose any of the international community’s faith and commitment to building back better.