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Monday, April 28, 2014

Debat sur l'état de la presse Haïtienne: Echanges entre les journalistes Daly Valet, Herold Jean Francois et Cyrus Sibert


La Presse Haïtienne malade ! par Daly Valet

Je n'aime plus la pratique du journalisme radio en Haïti. Je ne me sens plus à l'aise dans ce métier. Les choses sont allées trop bas et trop vite. C'est devenu un marché de vulgaires. Certes, il y a de rares exceptions...mais...hélas...crève-coeur !

La presse, ce soi-disant 4e pouvoir, dénonce systématiquement les dérives des 3 pouvoirs de l'Etat, sans dénoncer ni corriger ses propres dérives. Tout le monde a peur de critiquer la presse. Les journalistes eux-memes se tolèrent sans oser s'évaluer. Le courage leur manque pour stigmatiser les récentes dérives dans la pratique du métier. J'ai fini par comprendre que nous autres journalistes sommes d'invétérés intolérants face à nos critiques. Pourtant, nous fustigeons sans répit l'intolérance des autres.

La radiodiffusion en Haiti est le lieu où se lit de manière plus nette toute la déchéance de notre société. C'est le triomphe de la loi du nivellement par le bas et le trivial. La course vers le caniveau. On s'y plaît et s'y complait. Chacun essaie de faire plus bas dans le bas.

Jusqu'où, dans notre société, trop bas est trop bas ? Je n'en sais rien. Je sais au moins que ce n'est pas demain la veille que nous aurons une nouvelle presse de professionnels.

La presse écrite elle-même est en voie d'extinction lente. Le pays ne lit plus. Et nous écrivons de plus en plus mal le français. Les meilleurs cadres et les belles plumes de ce métier l'ont déserté en masse.

Les chaines de télévision
poussent comme des champignons.
Cependant, il n'existe pas de presse télévisée. Tout est embryonnaire, rachitique et caricatural. Les bonnes volontés sont pourtant là.

Nous ne saurions créer une Nouvelle Haiti sans inventer une nouvelle presse.

Un aggiornamento s'impose.

DV

Billet de Hérold Jean-François à Daly Valet

Faut-il croire que, dégoûté de nous, tu laisses la presse sur la pointe des pieds? Doit-on comprendre qu'avec cette sortie, quand on réfère à toi désormais, on doit dire Daly Valet, ex-journaliste?

Mais Daly, te rends-tu compte qu'après toutes les batailles menées par les démocrates, celui à qui l'on a confié les rennes du pouvoir n'est autre que Michel Martelly? As-tu oublié que, depuis le coup d'État du 30 septembre 1991, on est sorti de Dessalines et de la belle tradition d'autodétermination et de la fierté souverainiste? Depuis l'arrivée de la MINUSHA en 1992, ne vois-tu pas que, même pour lever une pelle et ramasser nos ordures, il nous faut une main étrangère?

La République des ONG, Daly, elle ne date pas du 12 janvier 2010. Rappelle-toi le titre d'un livre de Sauveur Pierre Étienne, L'Invasion des ONG (Le Natal, octobre 1997)! Et puis Daly, quand tu vas d'un point à l'autre du pays, l'état délabré de nos villes figées dans le temps si ce n'était la verrue des bidonvilles qui les encercle, cela ne traduit rien moins que l'échec de la nation? Alors mon ami, la gangrène de la corruption comme elle s'installe dans la 49e législature, à la Chambre des députés en particulier, ce qui rend le Parlement inopérant avant sa caducité prochaine par l'attitude même des sénateurs, n'est-ce pas là un objet de dégoût?

L'État affairiste qui nous tient lieu de pays aujourd'hui où les opérateurs politiques sont autant de dealers qui liquident, contre commissions, les ressources et biens de la nation; les scandales autour du pouvoir qui nous envoient la perception que nous sommes mal pris dans un vaste réseau d'association de malfaiteurs mettant à mal l'image de la principale institution nationale, la Présidence. La situation de dépendance de la justice malgré la création du CSPJ à cause d'une carence de personnalités de caractère, sans préjudice à ceux et celles qui en ont encore au sein de ladite entité; un substitut du commissaire du gouvernement incapable de dire non et qui se prête à une forfaiture et qui démissionne après coût plutôt qu'avant, n'avons-nous pas là, mon ami, des indices clairs de la décomposition de notre société qui nous donne de bonnes raisons d'avoir la nausée?

Tu n'es pas dégoûté par la société du crime qu'est devenu notre pays où des gens, parmi les plus en vue, disparaissent du jour au lendemain sans laisser de trace comme s'ils étaient une fiction et puis, affaire classée?

Nous aurions pu, Daly, écrire un livre à plusieurs tomes pour illustrer la difficulté de porter avec fierté la nationalité haïtienne en déroute pendant toute cette transition démocratique. Mais va-t-on lire, après le dégoût de la presse, ton dégoût d'Haïti et d'être Haïtien?

Mon cher Daly, quelque justifiée et préoccupante que puisse être la situation d'une certaine presse en Haïti, car  chacun des intervenants de la presse, pris séparément, n'est pas toute la presse dans un sens comme dans l'autre. Nous croyons fermement que ce qui reste encore de notre pays l'est, grâce à la contribution de la presse. Loin de nous la prétention d'écarter le mérite de femmes et d'hommes politiques, de parlementaires conséquents, de militants et d'activistes increvables, de défenseurs de droits de la personne courageux et téméraires, de leaders de la société civile tenaces, de braves citoyennes et citoyens d'organisations de femmes, d'associations de tous types.

 Mais Daly, le travail de la presse et des médias, malgré des limitations, déviations et autres attitudes faisant de la plateforme des médias un lieu de marchandage, de défense d'intérêt mesquin en rupture avec la déontologie, en dépit de la transformation des médias en lieu de positionnement, de deal voire de chantage, malgré des postures honteuses de confrères réclamant des per diem pour des formations, des "roulements", des cartes de téléphone à des parlementaires, malgré toutes les attitudes dégueulasses de certains de nos confrères, il y a en Haïti, globalement, une presse responsable dont l'absence aurait déjà conduit au déraillement du processus démocratique.

 La veille de cette presse pour monter au créneau et signaler les déviances, le courage de certains analystes, éditorialistes dont toi-même, la fougue de jeunes confrères qui couvrent l'actualité au quotidien pour informer la nation ne peut pas être jetée à la poubelle ou dans un fourre-tout comme le Conatel a tenté de le faire. En parlant du Conatel Daly, cela ne t'interpelle pas, les réflexes et l'état d'esprit autoritaire dans lequel a été adopté le décret du 12 octobre 1977 et qui prévaut aujourd'hui encore, après toutes les résistances depuis le 29 mars 1987 pour asseoir des acquis démocratiques dans un État de droit en gestation? En 2014, peut-on prétendre se constituer en une juridiction d'exception pour tenter d'intimider la presse, en marge de la Constitution et des lois de la République?

La presse, la corporation, les médias doivent être ouverts à la critique pour corriger les anomalies et certaines pratiques qui avilissent la profession. Cependant Daly, tout comme malgré tous les maux qui accablent notre pays, nous continuons avec stoïcisme d'assumer notre nationalité et allons au-devant de notre pays quand c'est nécessaire de le défendre contre les gifles de nos voisins, l'arrogance des proconsuls et autres envoyés spéciaux, tout comme mon ami, la presse, pour son utilité et les immenses services qu'elle rend à la nation dans une réalité d'institutions défaillantes et en plein dysfonctionnement, nous ne saurons, à la satisfaction de prédateurs et contempteurs qui applaudissent, jeter le bébé avec l'eau du bain. Nous ne devons pas alimenter en eau  le moulin des ennemis de la presse et de la liberté d'expression.

Il s'agit de se situer pour faire la part des choses, sans œillères, mais aussi sans autoflagellation. En tout cas, si ton expression de trop plein est une sorte de chronique d'un départ annoncé de la presse, ce serait dommage, ta plume va nous manquer.

Souviens-toi avant, pour réformer, restructurer, changer, bousculer, améliorer, il faut des combattants. Ce n'est ni la Minustha, ni les ambassades, ni l'Unesco, ni aucune instance étrangère qui remplacera le travail de notre presse. Tout comme c'est aux Haïtiennes et aux Haïtiens de se colleter aux défis avec persévérance et détermination pour changer Haïti. Malgré que toutes les conditions soient réunies pour nous décourager, l'heure n'est pas à la déprime. Nous savons que les ressorts pour rebondir sont bien là. Fraternellement.

De quelle Haïti parle Hérold Jean-François dans lettre à Daly Valet ? (Texte de Cyrus Sibert)

Le Journaliste Daly Valet
Faut-il croire que, dégoûté de nous, tu laisses la presse sur la pointe des pieds? Doit-on comprendre qu'avec cette sortie, quand on réfère à toi désormais, on doit dire Daly Valet, ex-journaliste?

Mais Daly, te rends-tu compte qu'après toutes les batailles menées par les démocrates, celui à qui l'on a confié les rennes du pouvoir n'est autre que Michel Martelly?
[CYRUS SIBERT :
Les batailles menées par les démocrates, ne voulaient-elles pas implanter la démocratie basée sur le suffrage universel en Haïti ?  De quel droit un intellectuel démocrate, si savant soit-il, peut-il contester le choix du peuple consacré par des joutes électorales suivant l'esprit procédural de la démocratie ? La classe moyenne d'Haïti avait fait le même raisonnement en 1991. Elle trouvait le Petit Prêtre des bidonvilles Jean-Bertrand Aristide trop peu pour diriger le pays ; ils ont ignoré le choix du peuple ; conséquences : Coup d'Etat, embargo, invasion, occupation et Tutelle internationale.]
As-tu oublié que, depuis le coup d'État du 30 septembre 1991, on est sorti de Dessalines et de la belle tradition d'autodétermination et de la fierté souverainiste? Depuis l'arrivée de la MINUSHA en 1992, ne vois-tu pas que, même pour lever une pelle et ramasser nos ordures, il nous faut une main étrangère?
[CYRUS SIBERT :
Cette situation ne date pas d'hier. Elle est le résultat de cette prétention de citoyens qui se croient au-dessus des principes démocratiques. Ces gens n'ont rien appris. Ils veulent déstabiliser le pouvoir en place qu'ils n'ont jamais accepté. La vérité, la participation de l'Etat haïtien dans le Budget national a augmenté avec l'arrivée de l'équipe Martelly/Lamothe. Haïti n'organise plus de réunions de bailleurs à Washington (USA) ou à Punta Cana (République Dominicaine) pour quémander l'aide humanitaire. Les officiels de ce pouvoir font appel à des investissements étrangers.  Il n'y a plus de soldat de l'ONU dans le Nord-Ouest et d'autres régions du pays. Un contingent de soldats haïtiens formés en Equateur est actuellement opérationnel sous le sol national. Le pouvoir en place négocie un plan de désoccupation du territoire national.]
La République des ONG, Daly, elle ne date pas du 12 janvier 2010. Rappelle-toi le titre d'un livre de Sauveur Pierre Étienne, L'Invasion des ONG (Le Natal, octobre 1997)! Et puis Daly, quand tu vas d'un point à l'autre du pays, l'état délabré de nos villes figées dans le temps si ce n'était la verrue des bidonvilles qui les encercle, cela ne traduit rien moins que l'échec de la nation?
[CYRUS SIBERT :
Depuis l'arrivée du Pouvoir Martelly/Lamothe, les villes sont de plus en plus propres. Au Cap-Haitien, les visiteurs constatent une ville plus propre qu'il y a 4 ans. La stratégie du pouvoir en place de faire du SMCRS un organisme stratégique avec plus de moyens, plus de ressources , la décision d'interdire l'importation de certains produits plastiques améliore considérablement l'image des villes de provinces. Le tourisme reprend ses droits. Des tours opérateurs organisent des visites guidées en Haïti. La semaine écoulée, j'ai vu au Cap-Haitien, des italiens, des allemands, des canadiens et un anglais d'origine haïtienne (adopté par un couple anglais) qui n'avait jamais connu sa terre natale. Ils étaient guidés par le « Tour operateur Lumière » qui travaille en partenariat avec une compagnie Européenne.]
Alors mon ami, la gangrène de la corruption comme elle s'installe dans la 49e législature, à la Chambre des députés en particulier, ce qui rend le Parlement inopérant avant sa caducité prochaine par l'attitude même des sénateurs, n'est-ce pas là un objet de dégoût?
[CYRUS SIBERT :
La corruption au parlement haïtien ne date pas d'hier. Depuis toujours, il y a les fameuses résolutions monnayées. Comme exemple, citons celles sur la SOCABANK, sur les importateurs de riz au Cap-Haitien,… En 1995, des députés de l'OPL étaient impliqués dans une affaire de vente de moteurs de voitures, un autre a été arrêté en Suisse transportant de la drogue dans ses valises. Comme aujourd'hui, ils n'étaient pas tous corrompus, mais la corruption existait. Plus prêt de nous, la 48e législature avec le Groupe CPP votait sans débattre des lois, sur simple ordre du Palais national. Le renvoi spectaculaire de Madame Duvivier Pierre-Louis et le vote des lois formant le CIRH sont des exemples forts. De plus, en 2011, n'est ce pas la société civile haïtienne et la classe politique qui exhortaient le Président Martelly de trouver une entente avec le parlement pour pouvoir gouverner. Le nouveau Président n'avait pas bénéficié du support de la société haïtienne face au refus des parlementaires de valider la nomination d'un Premier Ministre désigné Daniel Rouzier, jugé trop honnête et sérieux.  On rendait le Président Martelly responsable du blocage, on critiquait son incapacité à négocier avec le parlement. Alors, les faits sont là.  Si le pouvoir en place a suivi les conseils de la Société haïtienne jusqu'à constituer un bloc au parlement, qu'on ne vienne pas nous parler de corruption. Car, il était clair pour tout le monde, même le citoyen le plus simple, que les parlementaires faisaient chanter la Présidence dans le sens de leurs intérêts personnels, au détriment du général.]
 
L'État affairiste qui nous tient lieu de pays aujourd'hui où les opérateurs politiques sont autant de dealers qui liquident, contre commissions, les ressources et biens de la nation; les scandales autour du pouvoir qui nous envoient la perception que nous sommes mal pris dans un vaste réseau d'association de malfaiteurs mettant à mal l'image de la principale institution nationale, la Présidence.
[CYRUS SIBERT :
Pure spéculations !  La Présidence de Michel Martelly s'est toujours montré radical envers toute personne accusée, à raison, de violation de la loi. Le chauffeur du Chef de l'Etat est en prison pour une affaire de fausses cartes d'accès, le journaliste Moloscot (un partisan) est en cavale ; Calixte Valentin, le Conseiller Spécial du Chef de l'Etat a été emprisonné sur simple accusation. On se plaigne de sa libération, mais c'est une décision de justice.  Sonson la Familia est en cavale. Un jeune membre du cabinet de la Première Dame a été renvoyé parce qu'il est rapporté dans la presse comme un jeune ayant eu des démêlés avec la justice américaine. C'est encourageant dans un pays traditionnellement dictatorial où le Palais national est toujours au-dessus de la loi. Nous sommes loin d'un Président comme René Préval qui imposait des chefs de gangs comme membres de la Commission de Désarmement, au mépris des protestations des organisations des Droits humains. On peut dire même que c'est beaucoup si l'on considère que sur cette terre aucune Présidence ne se laisse pas traiter comme une personne morale dénuée de puissance publique.]
La situation de dépendance de la justice malgré la création du CSPJ à cause d'une carence de personnalités de caractère, sans préjudice à ceux et celles qui en ont encore au sein de ladite entité; un substitut du commissaire du gouvernement incapable de dire non et qui se prête à une forfaiture et qui démissionne après coût plutôt qu'avant, n'avons-nous pas là, mon ami, des indices clairs de la décomposition de notre société qui nous donne de bonnes raisons d'avoir la nausée?
[CYRUS SIBERT : C'est une erreur que cette décision du Président Martelly, d'instituer le CSPJ, a été adoptée avant un rapport de Vetting sur tous les juges du système. L'Exécutif est souvent victime des agissements de magistrats souvent motivés par l'argent que par le droit. Je pense comme Hérold Jean-François qu'il y a trop de juges corrompus dans le système. Le comportement de ce commissaire de gouvernement n'est pas nouveau. D'habitude, ils ne reculent pas devant l'argent. Et, c'est normal que ce dernier démissionne après avoir posé l'acte contesté. Ils sont nombreux les commissaires de gouvernement haïtiens qui ne reculent pas devant l'argent. Et si l'offre est importante, ils préfèrent commettre le forfait et démissionner après. Dans le dossier Sonson lafamilia, il s'agit de gens pourvus en argent. On ne peut pas attribuer cette décision à l'Exécutif. Enfin, le fait d'exiger la démission de ce magistrat est une preuve que le pouvoir exécutif fait des efforts. Car, sous les gouvernements Lavalas, lors du règne de la gauche haïtienne, on aurait eu un résultat différent. Il ne faut pas oublier que dans le temps, les policiers et commissaires corrompus étaient mutés au Palais National avec promotion.]

Tu n'es pas dégoûté par la société du crime qu'est devenu notre pays où des gens, parmi les plus en vue, disparaissent du jour au lendemain sans laisser de trace comme s'ils étaient une fiction et puis, affaire classée?
[CYRUS SIBERT :
Le journaliste semble être déconnecté de la réalité (factuelle)! Car, depuis l'arrivée du Président Martelly au pouvoir, on observe une lutte systématique contre le crime organisé. Les kidnappings ont diminué considérablement. La cellule anti-enlèvement de la PNH est renforcée et devient plus dynamique. Presque tous les crimes spectaculaires sont objet d'enquête. Hérold Jean-François semble se référer au cas du Sénateur Toussaint assassiné dans les années 90. Même l'enquête sur  l'assassinat du journaliste Jean Dominique le 3 avril 2001, a pu progresser grâce à l'administration du Président Martelly. Certes, le crime organisé reste un problème majeur, comme partout dans le monde. Mais, on ne peut pas dire que cela a empiré sous le gouvernement du Président Martelly. Le gang de Brandt existait et opérait dans le pays depuis longtemps. Il a fallu une administration comme celui du Président Martelly pour permettre à la police de l'arrêter. Les detracteurs diront que cela est du grâce à un contact au Département d'Etat Américain. Alors la question, ce Département d'Etat n'existait-il pas avant l'arrivée du Président Martelly ? Il faut donner à César ce qui est à César ! ]
Nous aurions pu, Daly, écrire un livre à plusieurs tomes pour illustrer la difficulté de porter avec fierté la nationalité haïtienne en déroute pendant toute cette transition démocratique. Mais va-t-on lire, après le dégoût de la presse, ton dégoût d'Haïti et d'être Haïtien?

Mon cher Daly, quelque justifiée et préoccupante que puisse être la situation d'une certaine presse en Haïti, car chacun des intervenants de la presse, pris séparément, n'est pas toute la presse dans un sens comme dans l'autre. Nous croyons fermement que ce qui reste encore de notre pays l'est, grâce à la contribution de la presse. Loin de nous la prétention d'écarter le mérite de femmes et d'hommes politiques, de parlementaires conséquents, de militants et d'activistes increvables, de défenseurs de droits de la personne courageux et téméraires, de leaders de la société civile tenaces, de braves citoyennes et citoyens d'organisations de femmes, d'associations de tous types.

Mais Daly, le travail de la presse et des médias, malgré des limitations, déviations et autres attitudes faisant de la plateforme des médias un lieu de marchandage, de défense d'intérêt mesquin en rupture avec la déontologie, en dépit de la transformation des médias en lieu de positionnement, de deal voire de chantage, malgré des postures honteuses de confrères réclamant des per diem pour des formations, des "roulements", des cartes de téléphone à des parlementaires, malgré toutes les attitudes dégueulasses de certains de nos confrères, il y a en Haïti, globalement, une presse responsable dont l'absence aurait déjà conduit au déraillement du processus démocratique.
[CYRUS SIBERT : C'est illogique de dénoncer tous ces problèmes déontologiques et de dire dans le même paragraphe « il y a en Haïti, globalement, une presse responsable dont l'absence aurait déjà conduit au déraillement du processus démocratique».  Une presse peut-elle être responsable et sérieuse avec tous ces défauts : [« lieu de marchandage, de défense d'intérêt mesquin en rupture avec la déontologie, en dépit de la transformation des médias en lieu de positionnement, de deal voire de chantage, malgré des postures honteuses de confrères réclamant des per diem pour des formations, des "roulements", des cartes de téléphone à des parlementaires, malgré toutes les attitudes dégueulasses de certains de nos confrères » ?]
Vu l'ampleur de ces dérives, c'est orgueilleux de vouloir parler de presse responsable après avoir cité tous ces problèmes. Sur ce point, la position de Daly Valet est louable. La presse haïtienne doit accepter de se réformer. D'ailleurs plusieurs recherches, réalisées par des universités étrangères ont démontré que la presse haïtienne a un problème de représentation.
Lisez : La représentation médiatique d'Haïti est problématique, selon un chercheur de l'UConnhttp://reseaucitadelle.blogspot.com/2013/01/la-representation-mediatique-dhaiti-est_5652.html ]

La veille de cette presse pour monter au créneau et signaler les déviances, le courage de certains analystes, éditorialistes dont toi-même, la fougue de jeunes confrères qui couvrent l'actualité au quotidien pour informer la nation ne peut pas être jetée à la poubelle ou dans un fourre-tout comme le Conatel a tenté de le faire. En parlant du Conatel Daly, cela ne t'interpelle pas, les réflexes et l'état d'esprit autoritaire dans lequel a été adopté le décret du 12 octobre 1977 et qui prévaut aujourd'hui encore, après toutes les résistances depuis le 29 mars 1987 pour asseoir des acquis démocratiques dans un État de droit en gestation? En 2014, peut-on prétendre se constituer en une juridiction d'exception pour tenter d'intimider la presse, en marge de la Constitution et des lois de la République?
[CYRUS SIBERT :
La note de la CONATEL visait à dénoncer le comportement irresponsable de Radio Zénith FM qui, au mépris du droit des marchands du secteur informel, a diffusé les noms des personnes ayant reçu de l'argent sous forme de prêt accordé par l'ONA. Une presse professionnelle devait pouvoir respecter le droit de ces marchands et comprendre le danger auquel elle les expose, en publiant des noms sur les ondes. C'est un acte méchant qui visait à livrer ces marchands aux gangs criminels. On doit pouvoir comprendre cette réalité injuste et simple. Puisque les médias haïtiens n'auraient jamais cité les noms de gros commerçants dits du SECTEUR DES AFFAIRES, on doit accepter le principe pour tout le monde. Ce principe de confidentialité ne peut pas exister seulement en faveur de commanditaires.  Cette reflexe de lutte antidictatoriale rend la presse stupide et ridicule. Car, elle la pousse à violer les principes le plus élémentaires de la profession suivant une logique de solidarité et de lutte. Le comportement d'une presse responsable aurait été une demande d'explication au CONATEL par l'Association des Médias, suivie d'une note de désapprobation appelant Radio Zénith à se ressaisir. ] 

La presse, la corporation, les médias doivent être ouverts à la critique pour corriger les anomalies et certaines pratiques qui avilissent la profession. Cependant Daly, tout comme malgré tous les maux qui accablent notre pays, nous continuons avec stoïcisme d'assumer notre nationalité et allons au-devant de notre pays quand c'est nécessaire de le défendre contre les gifles de nos voisins, l'arrogance des proconsuls et autres envoyés spéciaux, tout comme mon ami, la presse, pour son utilité et les immenses services qu'elle rend à la nation dans une réalité d'institutions défaillantes et en plein dysfonctionnement, nous ne saurons, à la satisfaction de prédateurs et contempteurs qui applaudissent, jeter le bébé avec l'eau du bain. Nous ne devons pas alimenter en eau  le moulin des ennemis de la presse et de la liberté d'expression.
[CYRUS SIBERT : Une conception militante de la presse, conséquences des périodes dictatoriales de Duvalier et militaires, la presse haïtienne se croit missionnaire et non UN SERVICE. Incapable d'évoluer avec le projet démocratique, cette presse se croit encore forgeuse de nation et de démocratie. Elle se croit au-dessus du peuple. C'est une presse aristocratique dominée par des seniors qui paralysent toute tentative de réforme, toute association de journalistes. Finalement, en Haïti, les travailleurs de la presse sont sous la coupe de journalistes seniors devenus patrons de médias… Un problème de classe transverse la presse haïtienne. La dialectique Journalistes-Seniors-patrons/Jeunes-journalistes-Employés-exploités crée une réalité de deux groupes d'intérêts divergents qui empêche de poser les vrais problèmes de réforme de la profession, de salaire et d'amélioration des conditions de travail. Car, quand les employés des salles de nouvelle cherchent de meilleur salaire, des formations complémentaires, des séminaires et de meilleures conditions de travail, le Journaliste Senior, souvent proches de pouvoir ou d'opposition, est prêt à tout sacrifier pour la prise du pouvoir ou le renversement du gouvernement en place. Le tout se fait au nom de la liberté d'expression. Et, voyant les avantages de cet espace d'hypocrisie folle, des personnes en conflit avec la loi comme les criminels et les trafiquants de drogue font leur entrée par la grande porte en y injectant leur argent sale en échange de louange et de protection.]

Il s'agit de se situer pour faire la part des choses, sans œillères, mais aussi sans autoflagellation. En tout cas, si ton expression de trop plein est une sorte de chronique d'un départ annoncé de la presse, ce serait dommage, ta plume va nous manquer. 

Souviens-toi avant, pour réformer, restructurer, changer, bousculer, améliorer, il faut des combattants. Ce n'est ni la Minustha, ni les ambassades, ni l'Unesco, ni aucune instance étrangère qui remplacera le travail de notre presse. Tout comme c'est aux Haïtiennes et aux Haïtiens de se colleter aux défis avec persévérance et détermination pour changer Haïti. Malgré que toutes les conditions soient réunies pour nous décourager, l'heure n'est pas à la déprime. Nous savons que les ressorts pour rebondir sont bien là. Fraternellement.
[N.B. : Le journaliste Cyrus Sibert a une position connue, une ligne claire - depuis toujours. Il sait établir un distinguo élémentaire entre fait et opinion. Il n'est pas de ces hypocrites qui se cachent derrière le principe de la « neutralité » tout en mélangeant les faits à leurs opinions dans le but de supporter un secteur politique et de combattre un autre. Il est contre cette soumission aux idées reçues, contre cette prétention qui fait des journalistes de la capitale haïtienne des donneurs d'ordre et de leçon. Il est un ouvert aux échanges, mais est contre toute forme d'arrogance.  Il n'est pas un démagogue.]



Saturday, May 21, 2011

Sur quelle Constitution Martelly a-t-il prêté serment? par Lemoine Bonneau

Haïti: Faisant suite à la lettre du président de la République adressée aux présidents des deux Chambres sur la désignation de Daniel Gérard Rouzier comme Premier ministre, le Sénat de la République s'apprête à former une commission spéciale pour analyser ses pièces. Du côté de la Chambre basse, les députés étant en congé, le bureau attend incessamment l'arrêté présidentiel qui doit convoquer le Corps législatif en session extraordinaire pour ratifier le choix du Premier ministre désigné et approuver sa déclaration de politique générale.

Cet arrêté, que prendra le chef de l'Etat, doit sans nul doute, selon les normes de rédaction des textes législatifs et réglementaires en Haïti, viser la Constitution dans les articles qui se rapportent au choix du Premier ministre et la convocation du Corps législatif en session extraordinaire. Quelle Constitution sera visée dans l'arrêté présidentiel ? Celle publiée dans Le Moniteur le 13 mai 2011, celle non amendée ou celle amendée par l'Assemblée nationale le lundi neuf mai 2011 ?

Comment le président de la République pourra-t-il prendre un arrêté sans publier auparavant la loi constitutionnelle qui mettra fin à la saga provoquée par la publication de la version erronée de l'amendement votée souverainement par l'Assemblée nationale le neuf mai 2011 ? Si Michel Martelly n'a aucune responsabilité dans cette crise de publication de la loi constitutionnelle, il ne peut non plus ignorer aujourd'hui la version réelle transmise vendredi par le président du Sénat. En dépit de la grossièreté de l'erreur commise à la fois par le bureau de l'Assemblée nationale et le secrétariat de l'ex-président René Préval, Martelly ne peut pas se passer de l'article 126 de la Constitution qui stipule que «la loi prend date du jour de son adoption par les deux Chambres». Ce qui semble vouloir dire que les formalités de promulgation et de publication ne constituent pas des normes supérieures aux lois et actes adoptés souverainement par les Assemblées législatives.

Sur quelle Constitution Michel Martelly a-t-il prêté serment ?
Si les erreurs matérielles contenues dans la publication de la loi constitutionnelle ne peuvent pas enlever le caractère souverain du vote des deux Chambres en Assemblée nationale, on peut prétendre qu'il a prêté serment sur la Constitution amendée.

Lemoine Bonneau
bonneau@lenouvelliste.com 


CRIME CONTRE LA CONSTITUTION: UNE AFFAIRE DE POLICE PAR GARY VICTOR*

En tant que citoyen, j'ai suivi avec stupéfaction l'histoire du texte de la Constitution de 1987 amendée publié dans le journal officiel Le Moniteur, texte qui ne serait pas celui voté par l'Assemblée nationale. J'ai entendu les opinions de plusieurs juristes; et ce qui m'a étonné, c'est que personne ne semble penser que cette affaire relève maintenant de la police purement et simplement, et d'un tribunal administratif qui devrait pénaliser les fonctionnaires coupables de délit de faux ou tout simplement incompétents.

J'ai entendu un juriste déclarer que tout ce qui est publié dans le journal officiel devient immédiatement officiel. Il devrait ajouter aussi : toute décision publiée et authentifiée comme telle par l'auteur de la décision. Si le journal officiel publie une décision fictive, cette décision est nulle et non avenue (Dans le temps, la rumeur faisait état de faux Moniteur).

Le problème, semble-t-il, est que l'envoi a été signé par le président de la République. Si on raisonne logiquement, on doit poser les hypothèses suivantes.

Première hypothèse : Le texte a été modifié au Moniteur (sur instruction de qui ?).

Deuxième hypothèse : Le texte a été modifié par la présidence.

Troisième hypothèse : Le président a signé - sans s'en rendre compte - un texte modifié qu'on lui a fait parvenir, et donc le texte aurait été « arrangé » par des mains intéressées au Parlement même, à moins que la falsification n'ait eu lieu pendant l'acheminement du texte par le ou les porteurs du Parlement à la présidence.

Quatrième hypothèse encore plus effroyable : Nous fonctionnons dans une telle incompétence, dans une telle médiocrité, que les pires erreurs peuvent se produire sans que personne s'en rende compte.

Dans les trois premières hypothèses, avant même de parler droit, il faut parler police. Il y a eu faux. Qui en est l'auteur ? Bien sûr, dans le cas certain que le texte publié n'est pas celui qui a été voté.

Le journal officiel ne pouvant officialiser qu'une décision prise et authentifiée par l'autorité compétente, il faut donc qu'on retrouve les minutes de la séance pour savoir ce qui a été voté exactement. J'ai entendu des déclarations faisant croire que les minutes de ces séances auraient disparu. Là encore, c'est une affaire de police. Qu'en est-il exactement ?

Dans ce méli-mélo où tout le monde intervient tout en essayant de faire en sorte qu'aucun coquin ne soit pointé du doigt alors que, là, il y a certainement la(les) main(s) de coquin(s) qui a (ont) presque atteint leur but, c'est-à-dire d'entraîner la nation dans des sempiternelles crises.

Il n'y a qu'une manière de sortir de cet imbroglio. Outre identifier et punir le ou les coupables quels qu'ils soient, c'est de revenir à la case départ. Et de respecter les règles. Comme le pense mon cher ami, grand passionné du jeu d'échecs devant l'Éternel, le Dr Georges Michel.

* Pour le profil de Gay Victor voir: http://www.lehman.cuny.edu/ile.en.ile/paroles/victor.html

Amendement de la Constitution de 1987 : FAUSSE COUCHE, par Hérold Jean-François

Vous devez sans doute avoir lu quelque part dans l’histoire d’Haïti cette expression ‘’fossoyeurs de la patrie’’. Elle a fleuri, il est vrai, dans la bouche des tenants du pouvoir autoritaire haïtien pour désigner les opposants contre lesquels on voulait justifier les crimes, représailles, bannissements, bref la violation des droits humains fondamentaux.

Même si heureusement, depuis l’ouverture démocratique du 7 février 1986, le pays est loin de cette réalité où l’opposition n’avait pas droit de cité et qu’elle constitue dès lors, une composante du nouveau système, il n’en demeure pas moins vrai que d’authentiques fossoyeurs de la patrie existent de nos jours. Désormais, il faut les chercher de préférence dans les rangs du pouvoir et au sein des institutions plutôt que dans l’opposition qui peut en receler mais dont les marges de nuisance n’ont pas autant d’impact …

Le piratage du texte de l’amendement constitutionnel relève d’un acte de fossoyeurs de la nation. Sans connaître les véritables mobiles de la main qui a glissé le mauvais texte, l’image que cette action envoie au monde entier c’est qu’en Haïti, nous nageons dans l’imperfection et que mêmes des questions aussi sérieuses que l’amendement de la Constitution, nous les banalisons.

DES PROCÉDURES

Nous faisons les choses avec légèreté. Ne devrions-nous pas avoir une commission au Parlement chargée de la révision et qui s’assure de la conformité du texte voté par l’Assemblée avec celui dactylographié par le Secrétariat et transmis à l’Exécutif pour publication ? Et avant la transmission, cette commission de révision ne devrait-elle pas avoir en main le brouillon corrigé et vérifier article par article si les changements apportés avant le vote ont été bien reportés ? Et au moment de la transmission du document au Chef de l’Exécutif, ne devrait-on pas avoir une copie conforme sur laquelle le réceptionnaire appose sa signature pour certifier de la remise en bonne et due forme du document ? Cette procédure minimale de la transmission du courrier dans les pratiques administratives ne devait-elle pas s’appliquer à un document aussi important ? Un fait est certain, aujourd’hui il n’y aurait pas eu de doute sur la provenance du problème, si ce minimum était respecté.

Et comme il s’agit de l’amendement du texte constitutionnel, est-ce que ce serait superflu si la commission chargée du suivi de la révision remettait en mains propres le produit modifié au Chef de l’État en vérifiant sur place avec lui l’ensemble des changements portés, pour éviter toute confusion ?

LA LOGIQUE DU RETARD

Mais, nous sommes en Haïti où toutes les tâches sont bâclées et où également le souci de perfection ou du moins celui de la conformité des choses n’imprime pas la cadence de nos mœurs et réflexes ! Si nous ne faisions pas les choses sur le fil, à la limite, comme c’était le cas pour le vote de l’amendement obtenu à cinq minutes de l’échéance dans la nuit du 9 au 10 mai 2011, juste avant la fin de la première session de la 49ème Législature, nous aurions eu le temps de nous rendre compte de ‘’l’erreur’’ et le Président de la République n’aurait eu qu’à porter les corrections nécessaires. Avec le Président Préval, le pays était entré délibérément dans une logique du retard qui nous poursuit aujourd’hui encore et qui aura des incidences bien longtemps après la fin de son mandat. A la fin du terme de la présente Législature et de celui du successeur de René Préval, le pays risque fort de se retrouver dans la guerre de récupération des mois perdus. Car, le Président Michel Martelly, contrairement à René Préval qui n’a pas respecté sa parole, n’a pris aucun engagement sur le respect de la date du 7 février 2016 comme étant la fin constitutionnelle de son mandat…Voudra-t-il comme son prédécesseur jouir des trois mois qui manqueront pour compléter son cycle présidentiel ? René Préval s’est octroyé le droit de ne pas respecter les échéances quant à l’organisation des élections prévues par la Constitution pour renouveler les institutions. Il s’est même permis de légiférer pour justifier ses manquements en prorogeant inconstitutionnellement les mandats des élus, incluant le sien propre.

La main qui a décidé de glisser dans le texte de l’amendement de la Constitution signé par le Président et publié au Moniteur des articles différents de ceux votés par l’Assemblée Nationale souveraine a passé le pays en dérision. Elle voulait tout brouiller, reprendre de la diaspora haïtienne les petites concessions faites quant à la reconnaissance de certains droits ; revenir au chemin de croix du Premier ministre aux deux Chambres pour sa déclaration de politique générale ; le mandat prolongé des élus, entre autres indéfinitions ! Tout le fructueux débat sur la procédure non respectée, toutes les heures de travail, les discussions et les sueurs froides de la journée du 14 septembre 2009 où le projet d’amendement a failli être rejeté par le Parlement, toutes les salives dépensées dans les émissions de libre tribune, tous les articles publiés et les prises de position des défenseurs de la Constitution du 29 mars 1987 qui ne voulaient pas qu’elle soit amendée de n’importe quelle façon, nous avons fait tout ça pour rien !... Nous nous trouvons devant la dure et cuisante réalité que l’amendement, puisque piraté, ne peut être validé. C’est comme s’il n’en était rien et qu’amender la Carta Magna n’a jamais été à l’ordre du jour… Quand le texte voté ne correspond pas au texte publié, nous sommes devant une situation où de malins imposteurs ont décidé de se substituer aux représentants mandatés du peuple et ont tenté d’exercer à leur place une jalouse prérogative, celle de légiférer souverainement, celle d’apporter suite à un vote démocratique, les ajustements au principal texte de référence qui régit la vie à travers les institutions de l’État.

Et quand, pour une raison ou pour une autre, on n’a pas pu, dans le temps et dans les normes, modifier le texte constitutionnel, l’on se voit contraint de revenir à la situation ex-ante. Le pays ne pouvant pas vivre sans matrice légale, la Constitution du 29 mars 1987 demeure le cadre régulateur jusqu’à la prochaine opportunité de l’amender.

OPPORTUNITÉ ET DÉCEPTION

Il y en a évidemment qui verront dans cette tentative de piratage de l’amendement constitutionnel, une opportunité. D’autres seront à juste titre déçus. Mais la Charte du 29 mars 1987 n’a-t-elle pas bon an mal an régulé la vie de la nation pendant 25 ans ? N’a-t-elle pas été, pendant le quart de siècle de cette transition démocratique, l’unique ciment d’unité nationale ? Tous, à un moment ou à un autre, nous l’avons évoqué pour justifier ou réclamer la jouissance d’un droit quelconque. D’ailleurs, les articles amendés ne devaient que l’alléger, l’épurer.

Dans son essence globale, la Constitution de 1987 est tout un projet de société dont l’application n’aurait fait que nous faciliter la vie. Si elle a été souventes fois violée, si certaines des institutions qu’elle préconise n’ont pas vu le jour jusqu’à sa tentative d’amendement, elle ne saurait en porter la responsabilité. Ce sont nos dirigeants qui n’ont pas manifesté la volonté suffisante depuis son vote d’organiser notre société suivant ses généreuses dispositions qui doivent porter la responsabilité de son application partielle…

Peut-être que nous avons là une opportunité : Celle de l’amender une première fois selon ses recommandations en entreprenant, ce faisant, un large débat national comparable à celui qui a précédé son adoption. L’amendement du 9 mai 2011 aura été une fausse couche comme d’autres faits de l’actualité nationale récente œuvrent dans le même sens. C’est comme si toute une conjonction de facteurs concourent pour donner à nos contempteurs des arguments pour arriver à la conclusion qu’Haïti est une République avortée.

Depuis le processus électoral pour aboutir à la honte du 28 novembre 2010, les résultats proclamés le 7 décembre 2010 et les protestations qui en ont naturellement découlé , l’arbitrage de l’international qui a forcé au changement des résultats, l’illusion de correction du deuxième tour jusqu’à la surprise des résultats définitifs qui ont soulevé l’indignation des uns et des autres et qui nous a valu une nouvelle injonction du ‘’blanc’’ pour aboutir à la déconcertante ‘’panne’’ électrique du 14 mai 2011, comme si elle était planifiée sur mesure pour que la prestation de serment du nouveau Président se passe dans l’obscurité, Haïti a été pris dans un cycle infernal de (permettez-nous ce néologisme) bancalisation de la vie politique.

Revenons à cette ‘’panne’’ d’électricité : Si loin de toute réalité objective, de la présomption de sabotage, de la consternation nationale et de l’avilissement sur la scène internationale parce que reprise en boucle par les chaînes de télévision étrangères, si tout cela était délibéré ? Si les ténèbres qui ont couvert cette prestation de serment convenaient à un rituel tordu pour répondre aux besoins d’un certain mysticisme lié à la prise du pouvoir et à la superstition des uns et des autres ?...